
Document public
Titre : | Arrêt relatif au refus d’effacer des casiers judiciaires la condamnation pénale pour avoir eu des relations homosexuelles, à la suite de la déclaration d’inconstitutionnalité de cette infraction : E.B. c. Autriche |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 07/11/2013 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 31913/07 |
Langues: | Anglais |
Mots-clés : |
[Géographie] Autriche [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Répression [Mots-clés] Infraction [Mots-clés] Justice pénale [Mots-clés] Orientation sexuelle [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Droit à un recours effectif [Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Mots-clés] Règlementation des services publics |
Mots-clés: | cassier judiciaire |
Résumé : |
Entre 1983 et 2001, les requérants ont été condamnés pour des infractions relevant de l’article 209 du code pénal, une disposition qui interdisait les relations homosexuelles entre adultes et mineurs de sexe masculin âgés de 14 à 18 ans. L’article 209 a été ultérieurement abrogé à la suite d’une décision de la Cour constitutionnelle du 21 juin 2002, laquelle estimait qu’il conduisait à des résultats arbitraires dans son application et n’était pas justifié par des raisons objectives. Il a été en outre jugé discriminatoire par la Cour européenne en ce qu’il ne s’appliquait qu’aux relations sexuelles entre personnes de sexe masculin et non féminin. A la suite de l’abolition de l’infraction, les requérants ont demandé la suppression de leurs condamnations de leur casier judiciaire mais se sont heurtés à un refus au motif que le ministère fédéral de l’Intérieur n’avait pas le pouvoir d’effacer une condamnation régulièrement inscrite au casier.
La CEDH conclut à l’unanimité à la violation de l’article 14 (interdiction de discrimination) combiné avec l’article 8 (droit au respect de la vie privée) de la Convention européenne des droits de l’homme. Compte tenu de leur caractère confidentiel et des conséquences qu’elles peuvent avoir sur l’intéressé, les informations inscrites au casier judiciaire se rattachent étroitement à la vie privée, même si elles se fondent sur une décision de justice rendue en public. Il est normal de modifier ou d’abroger les règles de droit pénal afin de les adapter à l’évolution des circonstances au sein de la société. Le seul fait qu’une condamnation pénale prononcée dans le passé se fonde sur une disposition légale qui a depuis lors perdu force de loi n’a en principe aucune incidence sur l’opportunité ou non de son maintien dans le casier judiciaire d’une personne, car elle porte essentiellement sur un fait passé. Abolir une infraction ou en modifier substantiellement ses éléments essentiels ne veut pas dire que la disposition, à la date où elle était en vigueur et où elle a été appliquée, ne satisfaisait pas à toutes les prescriptions de droit constitutionnel. La situation est toutefois différente dans le cas des requérants. Le parlement autrichien a abrogé l’article 209 du code pénal et l’a remplacé par une disposition substantiellement différente parce que la Cour constitutionnelle avait jugé qu’il ne se justifiait pas objectivement et était donc inconstitutionnel. La Cour a jugé discriminatoires les condamnations prononcées sur la base de cet article. La nouvelle disposition du code pénal a donc été insérée non pas dans le cadre d’un processus général d’adaptation du code pénal aux besoins d’une société en évolution mais pour éliminer une infraction contraire à la Constitution. Le législateur aurait dû en tirer des conséquences différentes. Lorsqu’il a modifié cette disposition de manière à la mettre en conformité avec les standards modernes d’égalité entre hommes et femmes, il aurait dû prendre des mesures appropriées, par exemple prévoir des exceptions à la règle de principe du maintien des condamnations dans le casier judiciaire, étant donné que le maintien d’une condamnation basée sur l’article 209 était susceptible d’avoir des conséquences graves pour l’intéressé. Or le Gouvernement n’a donné aucune explication à ce manquement. La Cour conclut en outre, à l’unanimité, à la violation du droit des requérants à un recours effectif, protégé par l’article 13 de la Convention. |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-127814 |