Document public
Titre : | Jugement relatif au caractère discriminatoire du gel de notation d’une infirmière titulaire en raison de ses absences pour congé maternité |
Auteurs : | Tribunal administratif de Rennes, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 04/05/2018 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 1600025 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Grossesse [Mots-clés] Maternité [Mots-clés] Congé de maternité [Mots-clés] Sexe [Mots-clés] Emploi public [Mots-clés] Fonction publique hospitalière [Mots-clés] Agent public [Mots-clés] Carrière |
Résumé : |
La requérante, infirmière titulaire au sein d’un centre hospitalier, se plaignait de l’absence de l’évaluation professionnelle au titre des années 2006 et 2008, en application d’une règle interne, au motif qu’elle avait cumulé plus de six mois d’absence liés à des congés de maternité. L’employeur a refusé en 2014 puis en 2015 de lui attribuer une note concernant ces deux années et de reconstituer en conséquence sa carrière rétroactivement. L’intéressée a sollicité en vain une indemnisation des préjudices subis en raison de la discrimination liée à son état de grossesse.
La requérante demande au tribunal, d’une part, d’enjoindre au centre hospitalier de rectifier son évaluation professionnelle et, d’autre part, de le condamner à indemniser les préjudices de carrière et moral qu’elle estime avoir subis. Le Défenseur des droits a décidé de présenter ses observations devant le juge. Le tribunal considère que les congés de maternité ne doivent avoir en principe aucun impact sur l’évolution de la carrière des femmes qui en bénéficient, qu’ils n’ont pas à être pris en compte pour l’avancement et ne sauraient avoir d’influence sur la notation et l’appréciation générale. Il considère qu’ainsi toute pratique qui subordonne le droit à la notation des agents à une durée de présence minimale constitue un traitement défavorable notamment à l’égard des femmes qui se trouvent pénalisées en raison de leur maternité. Dès lors, le maintien d’une telle pratique constitue un agissement discriminatoire fondé sur le sexe, la grossesse et la maternité en matière d’avancement. Le juge ajoute que subordonner la notation à une période minimale de présence durant la période de référence revient à instituer une distinction fondée sur l’état de santé des agents, prohibée par l’article 6 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. En l’espèce, il est constant que le centre hospitalier a décidé de maintenir pour les deux années la note que l’intéressée avait obtenue l’année précédente. La seule augmentation de note dont elle a bénéficié est intervenue en application d’un plan quadriennal de rattrapage d’application générale alors même que le supérieur hiérarchique de la requérante avait proposé une augmentation de note compte tenu de sa manière de servir. L’employeur ne soutient pas que la présence de la requérante dans le service était effectivement insuffisante afin de permettre une évaluation de sa manière de servir. Le tribunal conclut que les notes attribuées à la requérante pour les années 2006 et 2008 ne reposaient aucunement sur sa valeur professionnelle, alors que celle-ci pouvait être effectivement appréciée, mais sur le seul critère, irrégulièrement dicté, de la présence dans le service, inférieure à six mois. Cette illégalité fautive est susceptible d’engager la responsabilité du centre hospitalier. Le tribunal ajoute qu’en outre, le gel de la notation des agents non présents au moins six mois dans le service ainsi institué et pratiqué par le centre hospitalier a notamment pour effet de traiter de manière défavorable les agents absents pour maternité. Une telle mesure constitue une discrimination indirecte en raison de la grossesse ou de la maternité, et partant, de sexe. La requérante, à laquelle cette mesure discriminatoire a été appliquée dans le cadre de son évaluation professionnelle, est ainsi fondée à rechercher la responsabilité pour faute du centre hospitalier. Le tribunal considère que si l’intéressé invoque un retard de promotion qu’elle évalue à 11 mois, il ne résulte pas de l’instruction qu’elle aurait bénéficié d’un avancement plus rapide en l’absence de gel de sa notation. Le juge observer par ailleurs qu’elle ne peut se prévaloir d’aucun droit à bénéficier chaque année d’une note supérieure à celle attribuée l’année précédente. L’employeur doit verser à l’intéressée une somme de 300 euros correspondant au montant de la prime de service, directement lié à l’évaluation professionnelle de l’agent, ainsi qu’une somme de 1500 euros en réparation du préjudice moral subi en raison de la discrimination. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Emploi |
Est accompagné de : |
Documents numériques (1)
![]() JP_TA_Rennes_20180504_1600025.pdf Adobe Acrobat PDF |