Document public
Titre : | Arrêt relatif aux conditions d'accueil pendant trois mois d'une famille en attendant le dépôt de leur demande d’asile : N.T.P. c. France |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 24/05/2018 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 68862/13 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] France [Géographie] Congo [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Traitement inhumain et dégradant [Mots-clés] Absence d'atteinte à un droit/liberté [Mots-clés] Droit des étrangers [Mots-clés] Asile [Mots-clés] Situation de famille [Mots-clés] Condition de prise en charge [Mots-clés] Conditions d'accueil [Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Mots-clés] Préfecture |
Résumé : |
L'affaire concerne les conditions d'accueil en France d'une ressortissante congolaise accompagnée de ses trois enfants, alors âgés de 4, 3 et 2 ans, avant le dépôt de sa demande d’asile.
Arrivée en France en août 2013, la requérante a aussitôt tenté de déposer une demande d'asile. Sa demande n'a pas été enregistrée tout de suite et elle n'a pu avoir un rendez-vous que trois mois plus tard afin qu'il soit statué sur son admission au séjour et qu'elle dépose son dossier de demande d'asile. En attendant, n'ayant pas de statut de demandeur d'asile, la famille n'a bénéficié d'aucune prise en charge matérielle ou financière étatique. Durant cette période, la famille a été contrainte de dormir provisoirement au foyer géré par deux associations de droit privé. Les requérants devaient intégrer le foyer le soir à 19 heures, et un seul repas chaud était fourni. Chaque matin vers 7 heures 30, après qu’un petit déjeuner leur avait été servi, ils devaient quitter le foyer. Pendant la journée, ils tentaient de se réfugier dans une permanence d’association, lorsque celle-ci était ouverte. Les deux enfants les plus âgés ont été scolarisés en septembre 2013 à l'école maternelle. La requérante a déposé un recours en référé afin qu'il soit enjoint à l'administration, d’une part, d’examiner sa demande d’admission au séjour au titre de l’asile et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et, d’autre part, de lui indiquer un centre d’accueil pour demandeurs d’asile. Son recours a été rejeté tant en première instance qu'en appel. A la suite de son rendez-vous en préfecture en novembre 2013, la requérante et ses enfants ont été temporairement relogés dans un hôtel avant de pouvoir bénéficier, dix jours plus tard, d'une place en centre d'accueil des demandes d'asile, où ils se trouvent actuellement. A compter du 17 décembre 2013, la requérante a perçu l'allocation temporaire d'attente. Selon le gouvernement, les requérants bénéficient d'une aide alimentaire des Restaurants du cœur et d’une aide vestimentaire de la Croix Rouge. Les requérants soutiennent que leur exclusion des structures d’accueil entre pendant trois mois, en raison du refus des autorités françaises d’enregistrer leur demande d’asile, les a exposés à des traitements inhumains et dégradants. La Cour européenne des droits de l'homme juge qu'il n'y a pas eu violation de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme. Elle considère qu'il ne saurait être reproché aux autorités françaises, en l’espèce, d’être restées indifférentes à la situation des requérants qui ont pu faire face à leurs besoins élémentaires : se nourrir, se laver et se loger. En tout état de cause, la Cour constate également que, contrairement à d’autres affaires, les requérants n’étaient pas dénués de perspective de voir leur situation s’améliorer. En effet, la requérante avait été convoquée par la préfecture afin qu’il soit statué sur son admission au séjour et qu’elle dépose son dossier de demande d’asile. La Cour conclu que les requérants n’étaient pas dans une situation de dénuement matériel susceptible d’atteindre la gravité nécessaire pour tomber sous le coup de l’article 3 de la Convention. En ce qui concerne la violation alléguée du droit au respect de la vie privée et familiale (article 8 de la Convention), la Cour européenne des droits de l'homme déclare ce grief irrecevable. En effet, pour tenter d'établir, devant les juridictions internes, que l’administration avait porté une atteinte grave et manifestement illégale à leurs libertés fondamentales, les requérants n’ont pas soulevé, que ce soit expressément ou en substance, de doléances afférentes à leur vie privée et familiale. Ils se fondaient exclusivement sur des directives européennes et des dispositions de droit interne, dont ils contestaient l’interprétation qui en a été faite par le juge interne. La Cour considère qu'ainsi, de leur propre fait, les requérants, n'ont pas donné l'occasion au juge interne de redresser la violation alléguée de l’article 8 de la Convention. |
ECLI : | CE:ECHR:2018:0524JUD006886213 |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Etrangers - Migrants |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-183130 |