Document public
Titre : | Décision relative à l'irrecevabilité de la requête des parents contestant la décision d'arrêt de traitements de leur fille mineure dans un état végétatif persistant : Afiri et Biddarri c. France |
Voir aussi : |
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est cité par : | |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 23/01/2018 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 1828/18 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] France [Mots-clés] Santé - soins [Mots-clés] Bioéthique [Mots-clés] Fin de vie [Mots-clés] Droit à la vie [Mots-clés] Respect de la personne [Mots-clés] Enfant [Mots-clés] Autorité parentale [Mots-clés] Droit à un recours effectif |
Résumé : |
Les requérants sont les parents d’une adolescente de 14 ans souffrant d’une maladie neuromusculaire auto-immune sévère, hospitalisée depuis juin 2017 suite à un arrêt cardio-respiratoire.
Au vu des examens pratiqués, l'équipe médicale a constaté une évolution neurologique très défavorable avec de nombreuses et graves lésions cérébrales et lors d'une réunion de concertation pluridisciplinaire, une décision en faveur d'un arrêt de la ventilation mécanique a été prise en considérant que la poursuite du traitement constituait une obstination déraisonnable. En raison de l'absence de consensus avec les parents sur l'arrêt de traitement, la procédure collégiale prévue par l'article L. 110-5 du code de la santé publique a eu lieu mais les participants sont parvenus à la même conclusion. Les parents ont alors demandé au juge de suspendre l'exécution de la décision d'arrêt de traitement. Statuant exceptionnellement en formation collégiale, le tribunal a ordonné une expertise confiée à un collège de trois experts. Ils ont conclu au caractère déraisonnable du maintien de l'assistance respiratoire et de la nutrition artificielle. Les experts ont relevé que les requérants étaient peu investis dans les soins de leur fille et que leurs relations avec le personnel paramédical étaient globalement très difficiles. Ils ont relevé que l'adolescente avait exprimé son souhait " de ne pas vivre dans la situation qui était la sienne en mai-juin 2017 à domicile ". Ils ont rappelé la pratique, suivie en l'espèce par le médecin, chef du service de réanimation pédiatrique et son équipe, selon laquelle dans ce type de situation les professionnels ne procèdent pas à un arrêt des traitements contre l'avis des parents. Enfin, ils ont conclu que l'intérêt de l'enfant n'était pas celui des parents, ce qui les conduisait de façon exceptionnelle à proposer de ne pas poursuivre les traitements en assurant à l'enfant des soins palliatifs de qualité. Par ordonnance de 7 décembre 2017, les juge des référés du tribunal ont rejeté la demande des requérants. Ils se sont fondés sur la conclusion du rapport d'expertise et ont relevé l'absence de volonté clairement déterminé de l'adolescente. Les juges ont précisé que l'avis des parents revêtait une importance particulière mais que ceux-ci manifestaient une défiance à l'égard des médecins sans avoir de projet construit pour leur fille. Ils ont estimé que malgré l'opposition des parents, la poursuite des traitements caractérisait une obstination déraisonnable et que la décision d'arrêt de traitement ne portait pas, en l'espèce, une atteinte grave et manifestement illégale au respect d'une liberté fondamentale. Le Conseil d’État a rejeté l'appel des requérants. Les parents ont alors introduit la requête devant la CEDH le 9 janvier 2018 en demandant l'application des mesures provisoires. Invoquant l'article 2 (droit à la vie) et 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l'homme, ils se plaignent du fait que la décision d'arrêt de traitement de leur fille mineure soit finalement prise par le médecin alors qu'ils s'y opposent. Ils estiment qu'ils devraient avoir un pouvoir de codécision dans la procédure collégiale, en tant que parents et titulaires de l'autorité parentale. Invoquant l'article 13 (droit à un recours effectif), ils considèrent que le droit interne n'institue aucun recours effectif pour des parents qui s'opposent à la décision d'arrêt des traitements de leur enfant mineur. Ils invoquent également l'article 6§2 de la Convention d'Oviedo en ce qu'il prévoit que, lorsqu'un mineur n'a pas la capacité de consentir à une intervention, celle-ci ne peut être effectuée sans l'autorisation de son représentant. Par la décision du 23 janvier 2018 communiquée le 25 janvier, la Cour déclare, à l'unanimité, la requête des parents irrecevable comme étant manifestement mal fondée. La Cour estime que le cadre législatif français en vigueur est conforme à l'article 2 de la Convention et que, même si les requérants sont en désaccord avec l'aboutissement du processus engagé par les médecins, celui-ci a respecté les exigences découlant de cet article. Elle considère également que le droit français a permis a recours juridictionnel conforme aux exigences de l'article 2. Elle conclut que les autorités françaises se sont conformées à leurs obligations positives découlant de l'article 2, compte tenu de la marge d'appréciation dont elle disposaient en l'espèce. Enfin, elle rappelle qu'elle n'est pas compétente pour examiner des griefs tirés d'autres instruments internationaux (en l'espèce, la Convention d'Oviedo). |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Bioéthique |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-180588 |