Document public
Titre : | Décision 2017-277 du 1er décembre 2017 relative à l’utilisation d’un lanceur de balle de défense comme moyen de dissuasion à une distance réduite, avec une visée au niveau du haut du corps, à la fin d’une manifestation |
est cité par : |
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Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Déontologie de la sécurité, Auteur |
Type de document : | Décisions |
Année de publication : | 01/12/2017 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 2017-277 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Documents internes] Recommandation [Documents internes] Recommandation individuelle et générale [Documents internes] Position non suivie d’effet [Mots-clés] Relation avec les professionnels de la sécurité [Mots-clés] Lanceur de balle de défense [Mots-clés] Manifestation [Mots-clés] Police nationale [Mots-clés] Déontologie de la sécurité [Mots-clés] Usage de la force [Mots-clés] Exemplarité [Mots-clés] Procédure disciplinaire [Mots-clés] Violence |
Résumé : |
Le Défenseur des droits a été saisi des circonstances dans lesquelles le brigadier A a utilisé un lanceur de balle de défense (LBD) comme moyen de dissuasion, dans le cadre de la dispersion d’une manifestation contre la loi travail, dans la ville Z, le 15 septembre 2016.
Une vidéo publiée sur le site RUE 89, vient à l’appui de cette saisine. Cette vidéo montre le brigadier A en train de repousser plusieurs manifestants en les tenant en joue à une distance courte avec une arme à létalité réduite, un LBD 40X46. Le Défenseur des droits a obtenu plusieurs rapports sur les faits provenant de la contrôleuse générale B, directrice départementale de la sécurité publique du département Y, et du brigadier A mis en cause. Ce dernier a également été entendu par les agents du Défenseur des droits le 2 mars 2017. Sur l’usage disproportionné de la force : L’instruction du 22 avril 2015 n° 2015-1959-D en son annexe II « Emploi du lanceur de balle de défense de calibre 40mm en dotation dans les services de la police nationale et les unités de la gendarmerie nationale », précise au point 3.2 Mesures de sécurité : « Tant que la décision de tirer n’est pas prise, le LBD de 40 mm est maintenu en « position de contact » - pointée en direction de la menace, l’axe du canon sous l’horizontale, l’index le long du pontet, sans contact avec la détente ». A l’endroit où le brigadier A intervient, la menace est caractérisée par des individus, jeunes, non cagoulés, ne portant pas de projectiles, non armés, qui courent sur une place afin d’atteindre l’autre côté qui n’est pas bloqué par des policiers. Aucun dommage matériel n’était alors constaté et aucune menace pour l’intégrité physique de quiconque ne semble caractérisée. Selon l’article R. 434-18 du code de déontologie de la police nationale sur l’emploi de la force « Le policier ou le gendarme emploie la force dans le cadre fixé par la loi, seulement lorsque c’est nécessaire, et de façon proportionnée au but à atteindre ou à la gravité de la menace, selon le cas. Il ne fait usage des armes qu’en cas d’absolue nécessité et dans le cadre des dispositions législatives applicables à son propre statut. » Face à cette situation, l’utilisation initiale du LBD 40X46 mm de manière dissuasive n’était pas contraire aux textes en vigueur précités, dès lors que l’utilisateur se trouvait à une distance raisonnable du groupe d’individus, son LBD à la main, avec l’axe du canon dirigé sous l’horizontale, tout en annonçant les sommations d’usage, afin d’être prêt à intervenir en cas de débordements. Néanmoins, la position du LBD, lors de l’utilisation faite par le brigadier A, n’est pas conforme au cadre d’emploi du LBD. En effet, l’axe du canon se situe alors à l’horizontale et non sous cet axe comme le stipule l’instruction du 22 avril 2015. De plus, au regard de la distance entre le brigadier A et les manifestants (moins d’un mètre), du positionnement du LBD 40X46, et au surplus de l’endroit du corps visé, l’utilisation du LBD 40X46 constitue ici une menace de blessures graves ou de mutilation immédiate, si les manifestants ne reculaient pas. Par conséquent, l’usage de la force apparait disproportionné au regard de l’objectif – faire reculer des manifestants – de l’absence de menace qu’ils représentent, des modalités d’utilisation de l’arme, du risque encouru en cas de tir et du traumatisme susceptible d’être occasionné par la violence du geste réalisé. Le Défenseur des droits constate donc un manquement aux dispositions de l’instruction du 22 avril 2015 n° 2015-1959-D et de l’article R. 434-18 du code de déontologie de la police nationale et recommande la mise en œuvre de poursuites disciplinaires à l’encontre du brigadier de police A. Sur le devoir d’exemplarité : L’article R. 434-14 concernant les relations avec la population mentionne le devoir d’exemplarité du policier2. Cette exigence d’exemplarité, impose que le fonctionnaire de la police nationale soit intègre et impartial ; il ne doit se départir de sa dignité en aucune circonstance. Placé au service du public, le fonctionnaire de police doit se comporter envers celui-ci d’une manière exemplaire. Il doit avoir le respect absolu des personnes. Or, la crainte inspirée par cette arme, pointée vers le haut du corps et à bout portant, face à des individus non armés, ne peut participer à l’amélioration des relations entre la police et la population mais risque, au contraire, de les dégrader. Le devoir d’exemplarité du policier a, notamment, pour objectif de rétablir la confiance entre la police et la population, objectif primordial aujourd’hui. Or, en l’espèce, le devoir d’exemplarité n’a pas été respecté en utilisant un LBD 40X46 en tant que moyen de dissuasion, de manière horizontale et à bout portant, au cours d’une manifestation et caractérisant une menace immédiate de mort ou de blessure grave. Par conséquent, le Défenseur des droits constate à l’encontre du brigadier A un manquement à l’article R434-14 du code de la sécurité intérieure qui mentionne le devoir d’exemplarité et recommande la mise en place de poursuites disciplinaires à l’encontre du brigadier de police A. |
NOR : | DFDM1700277S |
Collège Défenseur des droits : | Déontologie de la sécurité |
Nombre de mesures : | 2 |
Suivi de la décision : | Réponse du ministère de l'Intérieur reçue le 23 juillet 2018. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Relation avec les professionnels de la sécurité |
Documents numériques (1)
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