Document public
Titre : | Arrêt relatif au caractère discriminatoire du refus de promotion en raison de grossesse de la salariée et à son affectation sur un autre secteur géographique d’activité à son retour de congé maternité |
Voir aussi : | |
Titre précédent : | |
Auteurs : | Cour d'appel de Grenoble, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 14/12/2017 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 15/05371 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Emploi [Mots-clés] Emploi privé [Mots-clés] Carrière [Mots-clés] Congé [Mots-clés] Congé de maternité [Mots-clés] Promotion [Mots-clés] Réintégration de poste [Mots-clés] Mutation [Mots-clés] Grossesse [Mots-clés] Licenciement |
Résumé : |
Embauchée en 2005 en qualité de secrétaire-standardiste, la requérante est devenue ingénieure commerciale à compter de 2008. Avant son départ en congé maternité en février 2014, sa promotion en tant que chef de vente a été envisagée par l'employeur en décembre 2013. Peu avant son retour de congé maternité, la salariée apprend qu’elle sera réintégrée au poste d’ingénieur commercial mais dans une autre agence située dans un secteur géographique différent. L'employeur justifiait ce changement par la volonté de renforcer l'équipe dans cette agence et par la performance de la salariée, très appréciée. Ayant refusé cette affectation, la salariée a été licenciée.
Soutenant avoir été victime de discrimination, l’intéressée a saisi le Défenseur des droits qui a décidé de présenter ses observations devant le juge prud’homal. Le conseil de prud’hommes a débuté la salariée de ses demandes en jugeant le licenciement justifié par une cause réelle et sérieuse. La cour d’appel infirme le jugement et reconnaît la discrimination en raison de l'état de grossesse. Elle considère que la promotion de l’intéressée au poste de chef de vente au sein de l’agence où elle travaillait avant son congé maternité a été promise de façon ferme à compter de mois de juin 2014 et non pas seulement évoquée ainsi que le soutient l’employeur. Or, il n’est pas contesté qu’à son retour de congé maternité, l’employeur a informé la salariée qu’elle occuperait le poste d’ingénieur commercial à l’agence située dans un secteur géographique différent. Pour la cour, ces éléments de fait soumis par la salariée sont de nature à laisser supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte en raison de son état de grossesse dès lors qu'ils sont survenus durant son congé maternité. Il incombe donc à l'employeur qui conteste le caractère discriminatoire d'établir que sa décision de ne pas respecter l'engagement ferme qu'il avait pris à l'égard de la salariée, est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La cour estime que le fait qu'à l'occasion d'un premier congé maternité courant 2010, la société ait fait bénéficier la salariée d'une promotion est sans incidence sur les faits de discrimination reprochés en 2014. Par ailleurs, la circonstance que l'employeur ait promis à la salariée le poste de chef des ventes alors qu'il avait déjà connaissance de son état de grossesse n'est pas un argument permettant d'exclure la discrimination laquelle n'est pas invoquée au stade de la promesse mais au stade de l'exécution de cette promesse. La cour relève que sans l'état de grossesse, la salariée aurait pu occuper immédiatement le poste qui lui était attribué. Le remplacement de l’intéressée pendant son congé maternité n'est pas davantage un élément justifiant la décision de l'employeur puisque celui-ci en avait parfaitement connaissance et avait prévu ce remplacement dans l'attente du retour de la salariée. En outre, l'affirmation selon laquelle la discrimination ne fait pas partie de l'éthique de la société et l'absence d'alerte de la salariée sur un problème de discrimination ne constituent pas davantage des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Enfin, la société qui a pris la décision d'affecter l’intéressée à la deuxième agence en qualité d'ingénieur commercial et de conserver sa remplaçante au poste de chef de ventes à l’agence d’origine ne démontre pas que la première salariée aurait démérité par rapport à la seconde chargée de l'intérim ni que le fait de ne pas honorer sa promesse aurait été justifié par des impératifs de gestion. La cour conclut que l'employeur échoue à démontrer que les faits matériellement établis par la requérante sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La discrimination liée à l'état de grossesse est donc établie et son licenciement est déclaré nul. La cour estime que compte tenu des circonstances de la discrimination subie et des conséquences dommageables qu'elle a eu pour la salariée qui a perdu son emploi à l'issue de son congé maternité, le préjudice qui en résulte sera réparé par l'allocation de la somme de 45.000 €. En revanche, la salariée ne justifie pas avoir subi un préjudice distinct résultant du refus de promotion. Sa demande de dommages et intérêts sera rejetée. De même, elle n'est pas fondée à réclamer des dommages et intérêts pour refus de réintégration au poste de chef des ventes, fonction qu'elle n'exerçait pas avant son départ en congé maternité. Sa demande à ce titre sera également rejetée. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Emploi |
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