
Document public
Titre : | Requête relative à la condamnation d'un laboratoire d'indemniser les préjudices liés aux effets secondaires d'un de ses vaccins : Sanofi c. France |
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Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 28/04/2016 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 25137/16 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] France [Mots-clés] Santé - soins [Mots-clés] Vaccin [Mots-clés] Indemnisation [Mots-clés] Indemnisation des victimes [Mots-clés] Responsabilité [Mots-clés] Justice [Mots-clés] Prescription [Mots-clés] Droit à un procès équitable [Mots-clés] Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) |
Résumé : |
Entre 1992 et 1995, une élève infirmière a reçu plusieurs injections d’un vaccin contre l’hépatite B fabriqué par la société requérante. En 1993, une sclérose en plaque lui a été diagnostiqué, puis en 1999, la maladie de Crohn et, en 2004, une polymyosite.
Imputant ces affections au vaccin contre l’hépatite B qui lui avait été administré, l’intéressée a saisi le juge administratif d’une action en responsabilité de l’État. Ella a obtenu gain de cause et l’Etat a été condamné en 2007 à lui payer plus de 656 000 € en réparation de ses préjudices et à lui servir une rente annuelle de près de 11 000 €. En 2005, elle a assigné la société requérante devant le juge civil afin d’obtenir réparation à raison de l’aggravation des préjudices dont elle avait obtenu l’indemnisation devant le juge administratif. Elle arguait d’un manquement de la société requérante à l’obligation de sécurité résultant des articles 1135 et 1147 du code civil, interprétés à la lumière de la directive 85/374/CEE du 25 juillet 1985 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux. En septembre 2013, le tribunal de grande instance a déclaré l’action recevable, faisant courir la prescription décennale à partir de la consolidation du dommage. Ce jugement a été confirmé en appel. Constatant que le juge administratif avait condamné l’État à indemniser ce préjudice, le juge civil a ordonné « avant dire droit sur l’indemnisation d’une aggravation du préjudice », une expertise visant notamment à dire si l’état actuel de la victime caractérisait une aggravation du préjudice déjà réparé. Au vu du rapport d’expertise, le tribunal a condamné la société requérante à payer à l’intéressée diverses sommes au titre du déficit fonctionnel permanent, des souffrances endurées et du préjudice esthétique, ainsi qu’une rente annuelle pour l’assistance d’une tierce personne. Le pourvoi en cassation de la société requérante a été rejeté en novembre 2015. Invoquant notamment principe de sécurité juridique et l’article 1 du Protocole n° 1, la société requérante reprochait à la cour d’appel d’avoir fixé le point de départ de la prescription à la date de consolidation du dommage, alors que la pathologie de la victime était par nature insusceptible d’une telle consolidation, ce qui avait eu pour effet de rendre son action imprescriptible. Elle reprochait par ailleurs à la cour d’appel d’avoir indument inversé la charge de la preuve et retenu des systèmes de présomptions tant à l’égard du lien de causalité entre la vaccination et le dommage, qu’à l’égard de la défectuosité du vaccin, présomptions qui n’auraient pu être combattues que par la preuve scientifique de ce que le vaccin n’était pas à l’origine de l’affection de l’intéressée. A l’appui de cette dernière critique, la requérante demandait à la Cour de cassation, à titre subsidiaire, de transmettre à la Cour de Justice de l’Union européenne quatre questions préjudicielles portant sur l’interprétation de la directive relative à la responsabilité du fait des produits défectueux. Introduite le 28 avril 2016, la requête a été communiquée par la CEDH le 11 septembre 2017. Griefs : Invoquant les articles 6 § 1 et 1 du Protocole n°1, la requérante se plaint de ce que la fixation du point de départ de la prescription de l’action de l’intéressée à la date de la consolidation du dommage a, de fait, rendu cette action imprescriptible dès lors que la maladie à la base du dommage était insusceptible de consolidation ; elle en déduit une violation du principe de sécurité juridique et une atteinte disproportionnée à son droit au respect de ses biens. Invoquant ces mêmes dispositions, la requérante se plaint d’avoir été « condamnée » sur le fondement d’une double présomption de causalité entre la vaccination et les pathologies de l’intéressée, d’une part, et la défectuosité du vaccin, d’autre part ; dès lors qu’il s’agirait d’une présomption de facto irréfragable, il y aurait là non seulement une atteinte à son droit à un procès équitable, mais aussi une atteinte disproportionnée au droit au respect de ses biens. Invoquant l’article 6 § 1, la requérante se plaint du fait que la Cour de cassation a rejeté sans indiquer de motifs sa demande de questions préjudicielles à la Cour de Justice de l’Union européenne. Questions aux parties : 1. La requérante a-t-elle épuisé les voies de recours internes s’agissant de ses deux premiers griefs, tirés de l’article 6 § 1 de la Convention et de l’article 1 du Protocole n°1 ? Dans l’affirmative, la requérante est-elle fondée à soutenir : (a) que la fixation par le juge civil du point de départ de la prescription de l’action en responsabilité civile dirigée contre elle à la date de la consolidation du dommage a eu pour effet de rendre cette action imprescriptible dès lors que l’affection à la base du dommage dont il était question en sa cause n’était pas susceptible de consolidation, et qu’il y a eu en conséquence violation du principe de sécurité juridique que garantit l’article 6 § 1 de la Convention et/ou une atteinte disproportionnée au droit au respect des biens que garantit l’article 1 du Protocole n° 1 ? (b) qu’elle a été condamnée sur le fondement d’une présomption de facto irréfragable, en violation du droit à un procès équitable que garantit l’article 6 § 1 de la Convention, et/ou, que cette circonstance caractérise une atteinte disproportionnée au droit au respect des biens que garantit l’article 1 du Protocole n° 1 ? 2. Vu notamment l’arrêt Ullens de Schooten et Rezabek c. Belgique (nos 3989/07 et 38353/07, 20 septembre 2011), la requérante est-elle fondée à soutenir qu’il y a eu violation en sa cause de l’article 6 § 1 de la Convention du fait que la Cour de cassation a rejeté sa demande de question préjudicielle à la Cour de Justice de l’Union européenne sans indiquer les motifs fondant cette décision ? |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-177553 |