Document public
Titre : | Arrêt relatif au caractère non-discriminatoire de la possibilité de bénéficier du report de l'exécution de la peine de prison réservé aux mères : Enache c. Roumanie |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 03/10/2017 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 16986/12 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] Roumanie [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Égalité femme - homme [Mots-clés] Peine de prison [Mots-clés] Établissement pénitentiaire [Mots-clés] Droit des détenus [Mots-clés] Aménagement de peine [Mots-clés] Conditions matérielles indignes [Mots-clés] Parent [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Discrimination non caractérisée |
Résumé : |
L'affaire concerne le grief d'un homme condamné à une peine de prison portant sur une discrimination fondée sur sexe car les dispositions légales roumaines ne permettent qu'aux femmes condamnées, mères d'un enfant de moins d'un an, d'obtenir un report de l'exécution de leur peine de prison. L'intéressé se plaignait également de ses conditions de détention.
La CEDH juge, par cinq voix contre deux, à l'absence de violation de l'article 14 (interdiction de discrimination) combiné avec l'article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale). La demande de report de l’exécution de la peine de prison du requérant, père d’un enfant de moins d’un an, avait été rejetée par les juridictions roumaines au motif que la norme en question était d’interprétation stricte. La Cour considère que l'intéressé peut prétendre se trouver dans une situation comparable à celle des femmes détenues. La Cour rappelle qu’une différence de traitement est discriminatoire si elle manque de justification objective et raisonnable, c’est-à-dire si elle ne poursuit pas un but légitime ou s’il n’y a pas un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé. Le gouvernement roumain précise que le but légitime poursuivi par la législation roumaine, reconnaissant aux seules femmes détenues la possibilité d’obtenir le report de l’exécution de leur peine jusqu’au premier anniversaire de leur enfant, était de protéger l’intérêt supérieur de l’enfant nouveau-né. Il fait également référence aux liens particuliers qui existent entre la mère et l’enfant pendant les premiers mois suivant la naissance. La Cour considère notamment que l’octroi aux femmes détenues de la mesure de report de l’exécution de leur peine n’était pas automatique, et que le droit pénal roumain en vigueur au moment des faits ménageait à tous les détenus, quel que fût leur sexe, d’autres possibilités de demander un report de peine. Elle observe également que le but des normes légales en question était de tenir compte de situations personnelles spécifiques ayant notamment regard aux liens particuliers qui existent entre la mère et l’enfant pendant la grossesse et la période précédant le premier anniversaire du nouveau-né. Pour la Cour, ce but peut être tenu pour légitime au sens de l’article 14 de la Convention et les arguments avancés par le gouvernement roumain ne sont pas manifestement dénués de fondement ou déraisonnables. La Cour considère donc que, dans le domaine spécifique concerné par la présente affaire, ces considérations peuvent constituer une base suffisante pour justifier la différence de traitement dont a fait l’objet le requérant. En effet, la maternité présente des spécificités qu’il convient de prendre en compte, parfois par des mesures de protection. Notamment, l’article 4 § 2 de la Convention des Nations unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes prévoit expressément que l’adoption par les États parties de mesures spéciales qui visent à protéger la maternité n’est pas considérée comme un acte discriminatoire. Cela est également valable lorsque la femme fait l’objet d’une mesure de privation de liberté. Par conséquent, la Cour estime, compte tenu de l’ample marge d’appréciation qu’elle reconnaît à l’État défendeur dans ce domaine, qu’il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but légitime recherché. L’exclusion litigieuse ne constitue donc pas une différence de traitement prohibée aux sens de l’article 14 combiné avec l’article 8 de la Convention. Il n’y a donc pas eu violation. En revanche, la Cour dit, à l'unanimité, que les conditions de détention du requérant l'ont soumis à une épreuve d’une intensité qui excédait le niveau inévitable de souffrance inhérent à la détention. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Discrimination - Egalité |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-177223 |