
Document public
Titre : | Requête relative à la condamnation d'un élu pour dénonciation calomnieuse : Tête c. France |
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Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 10/10/2016 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 59636/16 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Agent public [Mots-clés] Commune [Mots-clés] Liberté d'expression [Mots-clés] Lanceur d'alerte [Géographie] France |
Résumé : |
Opposant au projet de construction par une société sportive d’un nouveau stade de football inauguré en 2016, le requérant, un élu local, était, à titre professionnel, l’avocat d’autres opposants au projet et de personnes expropriées dans le cadre de sa réalisation.
Dans l’optique notamment de ce projet, la société a décidé d’entrer en bourse. Elle a préparé à cette fin un « document de base », conformément à la loi du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié et portant diverses dispositions d’ordre économique et social. Le requérant précise cette loi impose une transparence renforcée s’agissant de l’entrée en bourse des sociétés sportives et conditionne une telle opération à l’existence d’un projet d’actif tel que l’acquisition ou la construction d’un équipement sportif. Selon lui, sans stade, l’entrée en bourse de la société était illégale. Le requérant indique que, le 24 janvier 2010, ayant constaté que les délais mentionnés dans le document de base n’avaient pas été tenus, il a adressé une lettre ouverte au président de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF), dans laquelle il attirait l’attention de ce dernier sur les circonstances d’entrée en bourse de la société, en particulier sur la qualité de certaines informations relatives au projet figurant dans le document de base. Le président de l’AMF a répondu au requérant que le traitement des éléments qu’il avait portés à sa connaissance relevait bien des missions de cette dernière : veiller à la protection de l’épargne investie en instruments financiers, au bon fonctionnement des marchés correspondants et à la correcte information des investisseurs. Il a ajouté que la lettre du requérant avait été transmise aux services spécialisés qui suivent les questions de cette nature. Il a précisé toutefois qu’il ne pouvait donner de plus amples informations étant donné que l’AMF est astreinte à des règles strictes de secret professionnel. En avril 2010, la société ainsi que son président-directeur général ont déposé plainte contre le requérant du chef de dénonciation calomnieuse. Le requérant a été condamné en première instance à une amende délictuelle de 3.000 €, au versement d’un euro à titre de dommages-intérêts à chacune des parties civiles et au paiement de 5.000 € au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale. La cour d’appel a confirmé le jugement, y ajoutant la condamnation du requérant au paiement de 5 000 € aux parties civiles en application de l’article 475-1 du code de procédure pénale, au titre des frais exposés devant elle. La cour n’a pas répondu au moyen tiré d’une violation de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif à la liberté d’expression. La cour s’est attaché en revanche à caractériser l’élément matériel de l’infraction de dénonciation calomnieuse, la fausseté du fait dénoncé et l’élément intentionnel. Elle a considéré notamment que la fausseté des faits dénoncés était établie. Elle a précisé que les documents postérieurs relatifs à la société ont été également validés par l’AMF. La cour a considéré que la dénonciation n’avait été faite que dans un but autre que celui d’alerter l’autorité compétente d’infraction au code monétaire et financier. La Cour de cassation a rejeté le pourvoi du requérant. Invoquant notamment les articles 6 et 10 de la Convention, il se plaignait notamment du fait que la cour d’appel n’avait pas répondu à son moyen titré de l’article 10 de la Convention. Le requérant fait valoir que la fin de l’histoire lui a donné raison puisque des aides publiques ont été nécessaires pour finaliser la construction du stade, ainsi que des augmentations de capital, que la valeur des actions émises à 24 € oscille entre 2 et 3 €, et que, par dilutions successives, les nouvelles actions émises en 2007, soit 31,21 % du capital, pèseront 4 % environ suite à l’arrivée d’un nouvel investisseur. Introduite le 10 octobre 2016, la requête devant la CEDH a été communiquée le 13 septembre 2017. Grief : Invoquant l’article 10 de la Convention, le requérant dénonce une atteinte disproportionnée à son droit à la liberté d’expression. Questions aux parties : Le requérant a-t-il épuisé les voies de recours internes s’agissant du grief selon lequel sa condamnation pour dénonciation calomnieuse est constitutive d’une atteinte disproportionnée à son droit à la liberté d’expression et d’une violation de l’article 10 de la Convention ? Dans l’affirmative, cette condamnation est-elle constitutive d’une ingérence dans l’exercice de cette liberté ? Le cas échéant, cette ingérence était-elle prévue par la loi, dirigée vers un but légitime au regard du second paragraphe de l’article 10 de la Convention et nécessaire dans une société démocratique pour atteindre ce but ? |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-177551 |