Document public
Titre : | Décision 2017-240 du 27 juillet 2017 relative à un licenciement pour impossibilité de reclassement discriminatoire |
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Accompagne : | |
Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Emploi, biens et services privés (2016-2023), Auteur |
Type de document : | Décisions |
Année de publication : | 27/07/2017 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 2017-240 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Emploi [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Emploi privé [Mots-clés] Cessation d'activité [Mots-clés] Handicap [Mots-clés] Licenciement [Mots-clés] Reclassement professionnel [Mots-clés] Travailleur handicapé [Documents internes] Observations devant une juridiction [Documents internes] Observations devant une juridiction avec décision rendue [Documents internes] Position suivie d’effet |
Résumé : |
Le Défenseur des droits a été saisi d’un licenciement pour impossibilité de reclassement d’un salarié que ce dernier estime discriminatoire en raison du handicap.
L’instruction menée par le Défenseur des droits a permis de constater qu'après le prononcé de l’inaptitude du salarié d’origine professionnelle, l’employeur n’a pas procédé à des démarches actives et loyales de reclassement. En effet, l’employeur a envoyé un unique courrier électronique circulaire, en s’abstenant de mentionner les dernières compétences acquises par le salarié ainsi que le dernier diplôme qu’il avait obtenu, en ne contactant pas l’ensemble des sociétés avec lesquelles il avait des partenariats et en ne fournissant pas l’ensemble des réponses des sociétés interrogées. Après lui avoir organisé un entretien pour un poste disponible au sein de l’une des sociétés contactées, sans lui transmettre d’informations concernant ce poste, l’employeur lui a adressé un courrier avant la date de l’entretien dans lequel il l’a informé de l’impossibilité de procéder à son reclassement et de l’engagement d’une procédure de licenciement à son encontre. Croyant valablement l’entretien annulé, le réclamant ne s’y est pas rendu, ce qui lui sera reproché par la suite par l’employeur afin de justifier sa convocation à un entretien préalable. Le réclamant a saisi le conseil de prud’hommes qui l’a débouté de ses demandes au titre de la discrimination. Dans sa décision MLD-2014-135 du 3 novembre 2014, le Défenseur des droits a constaté l’absence de recherches de reclassement suffisamment sérieuses de la part de l’employeur permettant de maintenir le réclamant dans son emploi, en a déduit que son licenciement n’apparaissait pas objectif, nécessaire et approprié et constituait ainsi une discrimination fondée sur son handicap et a décidé de présenter ses observations devant la cour d’appel (décision MLD-2014-135 du 3 novembre 2014). Le 28 janvier 2015, la cour d’appel a réformé le jugement entrepris en ce qu’il a considéré que le réclamant avait exercé les responsabilités d’un cadre à partir de mars 2009 et avait condamné la société à lui verser un complément de salaire et a confirmé le jugement dans ses autres dispositions. Le réclamant a formé un pourvoi en cassation contre l’arrêt de la cour d’appel. Le Défenseur des droits a décidé de présenter ses observations devant la chambre sociale de la Cour de cassation (décision MLD-2015-214 du 8 septembre 2015). Le 8 février 2017, la Cour de cassation a censuré l’arrêt attaqué. Elle a accueilli les quatrième et cinquième moyens du pourvoi reprochant à la cour d’appel d’avoir rejeté les demandes de dommages et intérêts pour licenciement abusif et pour méconnaissance de l’obligation de ré-entraînement au travail des travailleurs handicapés. La Cour a retenu que la cassation prononcée entraînait également celle des dispositions rejetant la demande de dommages et intérêts pour discrimination. En conséquence et au vu de ce qui précède, le Défenseur des droits constate qu’en l’absence de recherches de reclassement suffisamment sérieuses permettant de maintenir le réclamant dans son emploi, le licenciement pour impossibilité de reclassement n’apparaît pas objectif, nécessaire et approprié et constitue une discrimination fondée sur son handicap. Le défenseur décide de présenter ses observations devant la cour d’appel de renvoi saisie du litige. |
Dommages-intérêts alloués en raison de la discrimination (en euros) : | 10000 |
Somme allouée hors discrimination (en euros) : | 50000 |
Suivi de la décision : |
Dans son arrêt du 26 janvier 2018, la cour d’appel de renvoi retient que l’employeur n’a pas entrepris des recherches loyales et sérieuses pour reclasser le salarié. Elle relève qu’alors que le salarié avait entrepris avec succès à compter de 2008 une formation qui devait à terme lui permettre d’accéder à des postes supérieurs à la direction des ventes et que le SAMETH avait attiré l’attention de l’employeur sur son cas, l’employeur n’a pas fait état de ce cursus et du diplôme obtenu dans le mail collectif adressé à certaines entreprises du groupe en vue de son reclassement. La cour relève également que le manque de loyauté et de sérieux des recherches de reclassement est confirmé par le fait que l’employeur a demandé au salarié de lui communiquer un CV actualisé postérieurement au mail collectif adressé aux entreprises du groupe et qu’il a reproché au salarié de ne pas s’être rendu à un rendez-vous pour fonder sa convocation à un entretien préalable alors que le salarié avait reçu quelques jours auparavant un courrier de l’employeur lui indiquant qu’aucun poste de reclassement n’était disponible et que son licenciement était envisagé. La cour en déduit que ces éléments traduisent le refus de l’employeur de se soumettre aux préconisations de la médecine du travail et de trouver un poste de reclassement compatible avec l’état de santé du salarié, et ce alors que le salarié avait démontré son désir et ses capacités d’évolution et que les mesures à mettre en œuvre pour permettre son reclassement ne présentaient pas une charge disproportionnée compte tenu de la taille du groupe auquel appartient la société et des aides susceptibles d’être perçues. Au vu de l’ensemble de ces éléments, la cour constate que l’employeur n’a pas respecté ses obligations de ré-entraînement et de reclassement à l’égard du salarié et a, ce faisant, refusé de prendre les mesures appropriées à son état de santé et à son handicap en violation avec l’obligation prévue à l’article L.5213-6 du code du travail. La cour relève que l’employeur ne démontre pas que ces manquements et le licenciement pour inaptitude aient été justifiés par des raisons objectives, nécessaires et appropriées et conclut que le licenciement encourt la nullité pour discrimination à raison de l’état de santé et du handicap du salarié. La cour condamne l’employeur à verser au salarié la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts au titre de la discrimination. Après avoir relevé l’absence de demande de réintégration du salarié, l’âge de 46 ans de ce dernier au jour du licenciement, ses 21 ans d’ancienneté dans l’entreprise, son salaire brut mensuel de 1 935 euros et son statut de travailleur handicapé, la cour condamne également l’employeur à verser au salarié la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la rupture illicite du contrat de travail. Ce faisant, la cour d’appel reprend l’intégralité des observations du Défenseur des droits et confirme un premier arrêt rendu par la cour d’appel en date du 20 octobre 2011 dans une affaire où la HALDE avait, à l’époque, présenté des observations. Il s’agit là d’un arrêt important pour le Défenseur des droits, qui vient consacrer son analyse juridique en matière de reclassement. |
Thématique Bulletin documentaire PDF : | Handicap - Autonomie |
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