
Document public
Titre : | Arrêt relatif à l'interception, la surveillance et l'examen des communications électroniques de toute personne se trouvant en Turquie : Sezigin Tanrikulu c. Turquie |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 18/07/2017 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 27473/06 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Technologies du numérique [Mots-clés] Service de renseignement [Mots-clés] Terrorisme [Mots-clés] Législation [Mots-clés] Droit à un recours effectif [Mots-clés] Décision de justice [Géographie] Turquie |
Résumé : |
L’affaire concernait une décision rendue par les juridictions nationales, lesquelles ont en 2005 autorisé pendant environ un mois et demi l’interception, la surveillance et l’examen des communications électroniques de quiconque se trouvait en Turquie.
Le requérant, député turc et ancien président de l’association d’un barreau, a eu connaissance de cette décision en juin 2005 en lisant la presse. Cette décision qui avait été prise par la cour d’assises le 6 mai 2005, habilitait les services de renseignement turcs à intercepter toutes les communications nationales et internationales entre le 8 avril et le 30 mai 2005 dans le but d’identifier des personnes soupçonnées de terrorisme. Peu après, le requérant a déposé une plainte pénale contre le juge de la cour d’assises qui avait prononcé la décision, contre le procureur ainsi que contre les agents des services de renseignement qui avaient sollicité cette décision et avaient pris part à sa mise en œuvre. Le parquet a décidé toutefois de ne pas poursuivre les agents des services de renseignement car il estimait que mettre en œuvre une décision de justice n’était pas constitutif d’une infraction. Le ministère de la Justice a décidé de son côté de ne pas engager d’action à l’encontre du procureur ou du juge, considérant que les actes de ces derniers relevaient du pouvoir d’appréciation judiciaire et que la décision de mai 2005 avait été prise dans l’intérêt de la sécurité nationale. Invoquant l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale, du domicile et de la correspondance), le requérant dénonçait la décision de mai 2005 qui avait autorisé l’interception des communications de quiconque se trouvait en Turquie, notamment lui-même. Il alléguait en particulier que les mesures d’interception étaient contraires à la législation en vigueur à l’époque des faits. Sur le terrain de l’article 13 (droit à un recours effectif), il disait également avoir été privé d’un recours judiciaire effectif parce que les autorités nationales auraient refusé de mener une enquête sur ses allégations concernant l’interception de ses communications. La CEDH conclut à l’unanimité à la violation de la Convention européenne des droits de l’homme en considérant notamment que l’interception autorisée n’était pas « prévue par la loi » au sens de l’article 8 §2 de la Convention. En effet, la décision litigieuse ne respectait pas les conditions posées par la loi turque. En particulier, elle ne limitait pas l’interception aux personnes soupçonnées d’infractions pénales énumérées par la loi turque. Cette dernière exigeait par ailleurs que l’autorisation d'interception ne soit ordonnée que lorsqu'il y avait de fortes présomptions de la commission d'un crime. Or, la décision litigieuse ne contenait aucune constatation ou autre indication à cet égard. Elle se référait aux infractions pénales énumérées par la loi sans préciser quels facteurs ont été pris en compte pour considérer que des crimes avaient été commis, alors qu’il s’agit d’un élément indispensable pour accorder une telle autorisation. Enfin, la loi nationale autorisait l’interception seulement lorsque l’identification ou l’arrestation de l’auteur et la collecte des preuves n’étaient possibles par aucun autre moyen. Il en résulte que la décision litigieuse devait expliquer pourquoi l’autorisation d’interception était la seule méthode de collecte des preuves et pourquoi d’autres mesures, moins intrusives, auraient été inefficaces. De plus, la Cour considère que le requérant ne disposait pas de recours effectif au moment des faits. |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-175464 |