Document public
Titre : | Requêtes relatives à la déchéance de nationalité française des individus condamnés pour terrorisme : Ghoumid et autres c. France |
Titre suivant : | |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 02/09/2016 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 52273/16 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] France [Mots-clés] Nationalité [Mots-clés] Terrorisme [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Sanction |
Résumé : |
En juillet 2007, les cinq requérants ont été condamnés à une peine de prison (de 6 à 8 ans avec une période de sûreté) par le tribunal correctionnel pour avoir participé à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un acte de terrorisme. En avril 2015, le Ministre de l’Intérieur les a informés qu’eu égard à cette condamnation, il avait décidé d’engager à leur encontre la procédure de déchéance de nationalité française prévue par les articles 25 et 25-1 du code civil. Après avis conforme du Conseil d’Etat, le Premier ministre a déchu les intéressés de leur nationalité française qu’ils avaient acquis soit par la déclaration soit par la naturalisation entre 1992 et 2001.
Par la suite, le Conseil d’Etat avait rejeté leurs demandes en référé tendant à la suspension des décrets portant déchéance de nationalité ainsi que leurs demandent d’annulation de ces décrets. Le Conseil d’Etat a conclu notamment que les requérants ne sauraient utilement soutenir que le décret attaqué méconnaissait les stipulations de l’article 4 du Protocole n° 7, qui « ne trouvent à s’appliquer que pour les poursuites en matière pénale, [dès los] que la déchéance de la nationalité constitue une sanction de nature administrative ». Il a jugé en outre que la sanction de déchéance de la nationalité, prévue par les articles 25 et 25-1 du code civil, a pour objectif de renforcer la lutte contre le terrorisme. Le Conseil a estimé que le décret portant déchéance de la nationalité française est par lui-même dépourvu d’effet sur la présence sur le territoire français de celui qu’il vise, comme sur ses liens avec les membres de sa famille, et n’affecte pas, dès lors, le droit au respect de sa vie familiale. Il a jugé qu’en revanche, un tel décret affecte un élément constitutif de l’identité de la personne concernée et est ainsi susceptible de porter atteinte au droit au respect de sa vie privée. Or, en l’espèce, il a considéré qu’eu égard à la gravité des faits commis par les requérants, les décrets attaqués n’ont pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de leur vie privée garanti par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Introduites devant la CEDH le 2 septembre 2016, les requêtes ont été communiquées le 23 mai 2017. Invoquant l’article 8 de la Convention combiné avec l’article 14 de la Convention, les requérants soutiennent que la déchéance de nationalité prononcée contre eux porte atteinte à leur droit au respect de la vie privée en ce qu’il comprend le droit à l’identité. Par ailleurs, invoquant l’article 4 du Protocole n° 7 et le principe non bis in idem, les requérants soutiennent que la déchéance de nationalité prononcée contre eux est une « peine déguisée », constitutive d’une sanction qui vise à réprimer la même conduite que celle pour laquelle ils ont été condamnés en 2007 par le tribunal correctionnel. Questions aux parties : 1. Eu égard à la jurisprudence de la Cour en la matière (voir en particulier K2 c. Royaume-Uni (déc.), n° 42387/13, 7 février 2017), les requérants sont-ils fondés à soutenir que la mesure de déchéance de la nationalité française qui a été prise contre eux emporte violation de leur droit au respect de la vie privée tel qu’il se trouve garanti par l’article 8 de la Convention, en ce qu’il comprend le droit à l’identité ? 2. Prononcer une déchéance de nationalité en application de l’article 25 du code civil revient-il à « puni[r] pénalement », au sens de l’article 4 du Protocole n° 7 ? Cette disposition trouve-t-elle à s’appliquer en l’espèce ? Dans l’affirmative, eu égard en particulier aux critères dégagés par la Cour dans les arrêts Sergueï Zolotoukhine c. Russie [GC] (no 14939/03, CEDH 2009) et A et B c. Norvège [GC] (n° 24130/11 et 29758/11, CEDH 2016), l’article 4 du Protocole n° 7 a-t-il été méconnu en la cause des requérants à raison de la mesure de déchéance de la nationalité française qui a été prise contre eux ? Les parties sont invitées à produire les conclusions du rapporteur public devant le Conseil d’État. |
Note de contenu : | Les cinq requêtes (n° 52273/16; 52285/16; 52290/16; 52294/16; 52302/16) ont été introduites le 2 septembre 2016. |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-174479 |
Cite : |
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