Document public
Titre : | Arrêt relatif au refus d’ordonner l’expulsion d’un campement des migrants installés sur un terrain privé |
Titre précédent : | |
Auteurs : | Cour d'appel de Douai, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 06/04/2017 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 16/06615 |
Format : | 16 p. |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Occupation illégale d'un terrain [Mots-clés] Migrant [Mots-clés] Domicile [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Bidonville [Mots-clés] Commune [Mots-clés] Domaine privé |
Résumé : |
Une commune et plusieurs personnes privées, propriétaires d’un terrain, ont demandé au juge des référés d’ordonner l’expulsion de plus de 250 migrants, dont femmes et mineurs, installées sur le terrain depuis plusieurs années. Nombreuses associations humanitaires et des bénévoles interviennent auprès des migrants leur assurant notamment un suivi social et médical.
En première instance, le juge des référés a débouté les requérants. Il a suivi les observations du Défenseur des droits, saisi par l’avocat de plusieurs occupants sans droit ni titre, selon lesquelles plusieurs normes européennes et internationales liant la France impliquent – sauf faits d’une exceptionnelle gravité – de surseoir à l’évacuation d’un terrain occupé illégalement dans les cas où les mesures d’accompagnement nécessaires n’ont pas été mises en œuvre afin que les occupants puissent quitter les lieux dans des conditions décentes et être accompagnés par les autorités dans le cadre du dispositif préconisé par la circulaire du 26 août 2012. Le juge des référés a considéré que la mesure d’expulsion sollicitée ne respecte pas les droits et la liberté d’autrui et n’est pas conforme à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme puisqu’elle met en jeu, outre le droit au respect du domicile, le droit au respect de la vie privée et familiale, l’obligation d’évacuer leur abri de fortune constituant une ingérence dans ces droits qui apparaît en l’espèce disproportionnée par rapport au droit des propriétaires de jouir de leur bien et ne manquerait pas de produire des résultats catastrophiques sur le plan sanitaire et de la sécurité des personnes concernées. La commune et les propriétaires du terrain ont fait appel de cette ordonnance. La cour d’appel confirme l’ordonnance sauf en ce qu’elle a déclaré recevable l’intervention volontaire du Défenseur des droits. La cour considère que les observations du Défenseur qu’il présente devant une juridiction ne lui confèrent pas la qualité de partie. Ensuite, la cour considère qu’en l’espèce, l’urgence de la situation pour ordonner l’expulsion n’apparaît pas caractérisée. La cour estime que le campement en cause constitue un logement pour les migrants même s’ils n’ont pas vocation à y rester indéfiniment. Elle approuve le premier juge qui avait à juste titre examiné si la mesure d’expulsion sollicitée afin de faire cesser un trouble (occupation des parcelles privées), était proportionnée à l’atteinte au droit au respect du domicile constitué par la perte du logement, en considération notamment des alternatives d’hébergement qui leur sont proposées. Elle cite le rapport d’observation du Défenseur des droits relatif au démantèlement d’autres campements qui s’interrogeait sur la qualité et la pertinence des orientations des migrants par les centres d’accueil et d’orientation (CAO) et dont l’objectif affiché semblait être celui de fluidifier au maximum les places en CAO. La cour souligne également l’inefficacité des mesures d’évacuation des campements en l’absence de solutions effectives de relogement, les migrants se réinstallant sur les lieux évacués. Par ailleurs, la cour estime que si l’atteinte au droit de propriété des requérants est caractérisée, ces derniers ne font état d’aucun projet d’aménagement des terrains en cause, ni de plainte d’exploitants agricoles qui seraient empêchés de travailleur en raison de l’installation du campement. Elle souligne que le campement assure un minimum de sécurité aux migrants grâce à l’installation de constructions précaires et à l’intervention de nombreuses associations, et leur permet de bénéficier d’un accès aux soins, d’eau potable, de service d’hygiène et d’une vie sociale. En conséquence, l’obligation d’évacuer ces abris de fortune constituerait une ingérence disproportionnée dans leur droit au respect de leur domicile et leur vie privée et familiale au regard de l’atteinte portée au droit de jouissance des propriétaires des lieux occupés illégalement. |
Est accompagné de : |
Documents numériques (1)
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