Document public
Titre : | Arrêt relatif au fait que le refus des discriminations selon l’origine des salariés constitue une composante du respect des valeurs républicaines par les organisations syndicales |
Titre précédent : | |
Auteurs : | Cour de cassation, Cass. Soc., Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 12/12/2016 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 16-25793 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Emploi privé [Mots-clés] Lieu de résidence [Mots-clés] Activité syndicale ou mutualiste [Mots-clés] Origine [Géographie] Corse |
Résumé : |
Un syndicat des travailleurs insulaires a déposé sa candidature en vue du scrutin national organisé par le ministère du travail auprès des salariés des très petites entreprises pour mesurer l’audience des organisations syndicales et apprécier leur représentativité.
En juin 2016, le directeur général du travail avait déclaré recevable la candidature de ce syndicat et sa propagande électorale. Quatre confédérations syndicales ont saisi le juge d’une demande tendant à l’annulation de la décision de la direction générale du travail. Ils soutenaient que le syndicat méconnaît le respect des valeurs républicaines car il poursuit une action illicite en prônant la priorité donnée aux salariés d'origine insulaire ou résidant sur l'île. Saisi par l'une des confédérations, le Défenseur des droits a estimé que l’objet du syndicat, candidat au scrutin national visant à mesurer l’audience et la représentativité des organisations syndicales auprès des salariés des très petites entreprises, était contraire aux valeurs républicaines, et notamment au principe d’interdiction des discriminations. Le tribunal d’instance a invalidé cette candidature en se fondant sur les statuts de ce syndicat et sur sa profession de foi, le tribunal d’instance avait retenu que ce syndicat apparaissait comme l’outil de diffusion de la doctrine de certains courants politiques et une organisation régionaliste défendant des intérêts régionalistes, pour en déduire que ce syndicat avait un objet illicite. La Cour de cassation a censuré cette décision et a renvoyé l’affaire au tribunal d’instance autrement composé, pour rechercher si le syndicat, indépendamment des mentions figurant dans ses statuts, poursuit dans son action syndicale un objectif illicite, contraire aux valeurs républicaines. Statuant sur renvoi après cassation, le tribunal d’instance a rejeté la demande formulée par les quatre confédérations. En se fondant sur les déclarations des dirigeants du syndicat des travailleurs et une grève déclenchée en février 2016 à l’appel du syndicat pour protester contre le recrutement de trois salariés venus du continent. Le tribunal a retenu que la recherche d’un emploi local se fait nécessairement par référence à une origine ou à une résidence sur l’île depuis plusieurs années, qu’il s’agit donc d’une référence à une discrimination liée à l’origine, directe ou indirecte. Il a toutefois précisé qu’il convenait de distinguer un comportement de provocation à la discrimination, comme celui du syndicat en cause, d’un comportement réalisant cette discrimination. En conséquence, il a validé la candidature du syndicat en énonçant que ce comportement relevait de la liberté d’expression et ne portait aucune atteinte aux valeurs républicaines. Les quatre confédérations ont formé un pourvoi en cassation. La Cour de cassation rejette leur pourvoi. La Cour rappelle, tout d’abord, que c’est à celui qui conteste le respect, par une organisation syndicale, des valeurs républicaines, d’apporter la preuve de sa contestation. Elle écarte par là-même le premier moyen, qui demandait l’application du mécanisme probatoire de l’article L.1134-1 du code du travail à la preuve du non-respect des valeurs républicaines par l’effet d’une discrimination. Ensuite, elle précise que méconnaît les valeurs républicaines un syndicat qui prône des discriminations directes ou indirectes, en raison de l’origine du salarié. Il en résulte que le refus des discriminations selon l’origine des salariés est une composante du respect des valeurs républicaines. Aussi, pour se voir reconnaître le droit d’exercer les prérogatives reconnues à un syndicat par le code du travail (négocier un protocole préélectoral, déposer des listes de candidats aux élections professionnelles, constituer une section syndicale, être déclaré représentatif), celui-ci ne peut prôner de distinctions selon l’origine des salariés. En l’espèce, la Cour approuve néanmoins la décision du tribunal d’instance d’avoir déclaré valable la candidature du syndicat, dès lors que les éléments produits par les confédérations requérantes étaient insuffisants à apporter la preuve que l’action syndicale du syndicat en cause dans les entreprises prônait des distinctions fondées sur l’origine, ce dont il se déduisait que ce syndicat n’avait pas poursuivi un objectif contraire aux valeurs républicaines. |
ECLI : | FR:CCASS:2016:SO02391 |
En ligne : | https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000033631545 |
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