Document public
Titre : | Ordonnance de référé relative au démantèlement du site de la Lande de Calais |
Auteurs : | Tribunal administratif de Lille, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 18/10/2016 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 1607719 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Droit des étrangers [Mots-clés] Mineur non accompagné [Mots-clés] Condition de prise en charge [Mots-clés] Mineur étranger [Mots-clés] Procédure de référé [Mots-clés] Absence d'atteinte à un droit/liberté [Mots-clés] Aire de campement [Mots-clés] Migrant [Mots-clés] Expulsion [Géographie] Nord-Pas-de-Calais [Géographie] Pas-de-Calais [Géographie] Calais |
Résumé : |
Plusieurs associations et migrants demandent au juge des référés d’ordonner plusieurs mesures dont la suspension du démantèlement du site de la Lande de Calais.
Les requérants soutiennent en particulier que compte tenu des modalités selon lesquelles l’évacuation doit intervenir, celle-ci aboutira à ce que plusieurs milliers de personnes, qui ne pourront pas être accueillies faute de places disponibles ou qui ne souhaitent pas aller en centre d’accueil et d’orientation, notamment parce qu’elles ne veulent pas ou qu’elles ne remplissent pas les conditions pour déposer une demande d’asile en France, ou encore qui en repartiront rapidement à défaut pour ces structures d’être adaptées à leurs besoins, retomberont en errance ou se dirigeront vers d’autres bidonvilles dans des conditions encore pires que celles dans lesquelles elles vivent actuellement. Le Défenseur des droits a présenté ses observations devant le tribunal administratif. Statuant en formation collégiale, les juges des référés du tribunal administratif rejettent la demande des requérants sans examiner la condition d'urgence. Les juges considèrent qu’il est constant que le principe même du démantèlement de ce site ne méconnaît pas le principe de prohibition des traitements inhumains et dégradants. Selon les juges, ce démantèlement vise, au contraire, notamment, à faire cesser de tels traitements, auxquels sont aujourd’hui soumis les migrants qui vivent sur ce site, dans des conditions de précarité et d’insécurité dénonces par tous, notamment les associations requérantes elles-mêmes, le Défenseur des droits et, s’agissant de la situation particulière des mineurs, par l’Unicef, en les orientant vers des structures d’accueil et de mise à l’abri. Ils ajoutent qu’il ne résulte pas de l’instruction que l’État aurait sous-estimé le nombre de migrants devant être logés en centre d’accueil et d’orientation (CAO) ou que l’opération visant l’identification, notamment des mineurs non accompagnés (qui veulent partir au Royaume-Uni ou ceux qui souhaitent rester en France), ne sont pas correctement menées. Le fait que les autorités de l’État n’aient pas communiqué aux associations requérantes la liste précise des CAO qui doivent accueillir les personnes venant de Calais ne permet pas d’établir que l’Etat ne disposerait pas des 7254 places annoncées. De même, les juges estiment qu’il ne résulte pas de l’instruction que les conditions d’accueil en CAO ne permettraient pas la prise en compte des problématiques, notamment sociales et médicales, de certains migrants. Concernant en particulier les mineurs isolés, les juges considèrent que si les associations soutiennent que les structures devant les accueillir ne sont pas aux normes, le fait d’être logés dans ces structures plutôt que dans le campement actuel ne saurait, en tout état de cause, constituer pour les mineurs concernés un traitement inhumain ou dégradant. En outre, le fait que certaines personnes actuellement présentes sur le site ne souhaiteraient pas se rendre dans un CAO ou qu’elles n’y resteraient que quelques jours avant de repartir, se retrouvant alors dans une situation d’errance, ne saurait caractériser une carence des différentes autorités publiques concernées qui ne sont pas tenus de prendre en compte le choix par les migrants de leur État ou de leur lieu de résidence. Les requérants soutiennent que la seule solution adaptée serait de prévoir plus de capacités d’accueil dans le Calaisis et le cas échéant, d’aménager le campement actuel avec des bâtiments en dur, pour y loger les migrants qui souhaitent passer clandestinement au Royaume-Uni. Les juges des référés considèrent que l’absence de mise en œuvre par l’État d’une telle solution, qui au demeurant ne répond pas ou seulement partiellement à la problématique des troubles à l’ordre public, s’agissant tant des migrants eux-mêmes, qui seraient toujours exposés à l’emprise des réseaux de passeurs et qui continueraient de risquer leur vie pour tenter de se rendre en Angleterre, que des habitants de Calais et des usagers de la rocade, ne saurait constituer une atteinte manifestement grave et illégale à une liberté fondamentale. Pour ces mêmes raisons, et à supposer même que les abris de fortune de certains migrants présents sur le site de la Lande puissent être considérés, au regard de l’ancienneté de leur installation, comme des domiciles au sens de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, les juges estiment que la mesure d’évacuation envisagée ne porte pas au droit à la vie privée et familiale et à l’inviolabilité du domicile une atteinte disproportionnée au regard des objectifs qu’elle poursuit. |
Est accompagné de : |
Documents numériques (1)
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