Document public
Titre : | Arrêt relatif au refus injustifié d'ordonner le retour d'un enfant de deux ans illicitement déplacé par sa mère au motif que la séparation avec celle-ci serait traumatique : G.N. c. Pologne |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 19/07/2016 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 2171/14 |
Langues: | Anglais |
Mots-clés : |
[Géographie] Pologne [Géographie] Canada [Mots-clés] Enlèvement parental [Mots-clés] Intérêt supérieur de l'enfant [Mots-clés] Non représentation d'enfant [Mots-clés] Enfant |
Résumé : |
L’affaire concerne le refus des juridictions polonaises d’ordonner le retour au Canda d’un enfant de deux ans illicitement déplacé par sa mère au motif que la séparation avec celle-ci serait traumatique.
Les parents de l’enfant résidaient au Canada où l’enfant est né en septembre 2010. En mai 2011, suite à la séparation du couple alors que la famille était en vacances en Pologne, la mère a refusé de rentrer au Canada avec l’enfant. Saisi par le père d’une demande visant le retour de son enfant en vertu de la Convention de la Haye sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, le juge polonais refuse d’ordonner le retour de l’enfant alors âgé de deux ans et demi, tout en reconnaissant qu’il était retenu illicitement en Pologne par la mère au sens de la Convention de la Haye. En se fondant sur le fait que l’enfant avait un lien émotionnel fort avec sa mère, qu’il ne reconnaissait pas son père et ne le percevait pas comme un parent, le juge a estimé que le retour de l’enfant au Canada constituerait une menace pour son développement émotionnel et social. Par ailleurs, il a considéré que les ordonnances provisoires émises entre temps par les juridictions canadiennes accordant la garde de l’enfant pleine et entière à son père, était hors de propos pour la demande en cause. Devant la CEDH, le père se plaint de la mauvaise application de la Convention de la Haye par les juridictions polonaises et de la durée trop longue de la procédure. La Cour estime que le raisonnement des juridictions internes ne répondait pas aux exigences de l’article 13(b) de la Convention de La Haye qui prévoit la possibilité de ne pas ordonner le retour d’un enfant lorsque la personne qui s’oppose à son retour établit qu’il existe un risque grave que ce retour expose l’enfant à un danger physique ou psychique ou le place dans une situation intolérable. Elle constate le défaut d’éléments nécessaires pour l’évaluation correcte de l’intérêt supérieur de l’enfant dans le cadre de la procédure prévue par la Convention de la Haye. En effet, alors qu’il appartenait à la mère de justifier un risque spécifique au titre de l’article 13 (b), celle-ci n’a indiqué aucune raison objective justifiant son opposition au retour de l’enfant au Canada. Le tribunal a fondé son refus d’ordonner le retour de l’enfant sur les difficultés de séparation du jeune enfant avec sa mère qui le placerait, selon le juge, dans une situation intolérable. Par ailleurs, rien n’indiquait que la mère ne pouvait retourner au Canada avec l’enfant. Même si un avis de recherche a été émis par Interpol à son égard pour l’enlèvement d’enfant, la CEDH n’a pas de connaissance de tentatives d’appréhender la mère en Pologne. De même, rien n’indique que le père aurait pu empêcher la mère de voir l’enfant au Canada ou qu’elle n’y aurait pas eu d’accès aux recours juridiques pour assurer la défense de ses intérêts et ceux de son enfant. La Cour note que le gouvernement polonais ne donne aucune explication quant à la longueur de la procédure (un an et cinq mois). Même si le délai de six semaines prévu par la Convention de la Haye n’est pas obligatoire, les autorités avaient une obligation positive d’agir avec célérité dans une procédure relative au retour d’un enfant illicitement déplacé. La CEDH conclut que nonobstant la marge d’appréciation dont jouissent les États en la matière, la Pologne n’a pas respecté ses obligations positives qui lui incombent en vertu de l’article 8 de la Convention afin de garantir le droit du père au respect de sa vie familiale. Enfin, observant que l’enfant a perdu le contact avec son père à l’âge de six mois et a vécu en Pologne avec sa mère depuis plus de quatre ans, la Cour précise que le présent arrêt ne doit aucun cas être interprété comme suggérant à la Pologne de prendre des mesures pour ordonner le retour de l’enfant au Canada. |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng/?i=001-164923 |