
Document public
Titre : | Décision relative à la responsabilité du département pour des faits délictueux commis par un mineur pris en charge par le service d'aide sociale à l'enfance |
Auteurs : | Conseil d'Etat, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 01/07/2016 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 375076 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Mineur auteur d'infraction pénale [Mots-clés] Aide sociale à l'enfance (ASE) [Mots-clés] Responsabilité civile [Mots-clés] Responsabilité de l'Etat [Mots-clés] Département |
Résumé : |
Alors qu’il était accueilli avec l’accord de son père à l’aide sociale à l’enfance, un mineur avait commis des infractions pénales graves qualifiées de crime et de délits par une cour d’assises des mineurs. Celle-ci l’a condamné, ainsi que son père en qualité de civilement responsable, à payer 20.000 euros aux victimes.
L’assureur du père, condamné à rembourser ces sommes au Fond de garantie des victimes ayant indemnisé les victimes, a recherché la responsabilité du département. Le juge de première instance a condamné le département au paiement de ces sommes mais la Cour d’appel a annulé le jugement en considérant que les faits n’engageaient pas le département puisque lorsqu’ils étaient commis, le mineur était accueilli, comme chaque fin de weekend, au domicile de son père et qu’il était donc sous la responsabilité de ce dernier. Le Conseil d’Etat censure l’arrêt de la Cour d’appel. Il rappelle qu’il appartient au juge administratif, saisi d'une action en responsabilité pour des faits imputables à un mineur pris en charge par le service d'aide sociale à l'enfance, de déterminer si, compte tenu des conditions d'accueil du mineur, notamment la durée de cet accueil et le rythme des retours du mineur dans sa famille, ainsi que des obligations qui en résultent pour le service d'aide sociale à l'enfance et pour les titulaires de l'autorité parentale, la décision du président du conseil général, devenu conseil départemental, prise avec le consentement des titulaires de l'autorité parentale, s'analyse comme une prise en charge durable et globale de ce mineur, pour une période convenue, par l'aide sociale à l'enfance. Si tel est le cas, cette décision a pour effet de transférer au département la responsabilité d'organiser, de diriger et de contrôler la vie du mineur durant cette période. Le Conseil d’Etat précise que ni la circonstance que la décision de prise en charge du mineur prévoie un retour de celui-ci dans son milieu familial de façon ponctuelle ou selon un rythme qu'elle détermine ni celle que le mineur y retourne de sa propre initiative ne font par elles-mêmes obstacle à ce que cette décision entraîne un tel transfert de responsabilité. Il considère qu’en raison des pouvoirs dont le département se trouve, dans ce cas, investi, sa responsabilité est engagée, même sans faute, pour les dommages causés aux tiers par ce mineur, y compris lorsque ces dommages sont survenus alors que le mineur est hébergé par ses parents, dès lors qu'il n'a pas été mis fin à cette prise en charge par le service d'aide sociale à l'enfance par décision des titulaires de l'autorité parentale ou qu'elle n'a pas été suspendue ou interrompue par l'autorité administrative ou judiciaire. A l'égard de la victime, cette responsabilité n'est susceptible d'être atténuée ou supprimée que dans le cas où le dommage est imputable à une faute de celle-ci ou à un cas de force majeure. En outre, dans le cadre d'une action en garantie, le département peut, le cas échéant, se prévaloir de la faute du tiers ayant concouru à la réalisation du dommage. En l’espèce, le Conseil d’Etat considère qu’en se fondant sur la seule circonstance que le mineur était accueilli en fin de semaine chez son père pour en déduire que la responsabilité du département n’était pas engagée, sans rechercher si la décision par laquelle le président du conseil général avait décidé de le prendre en charge, formalisée dans des contrats de placement, avait eu pour effet de transférer au département la responsabilité d'organiser, diriger et contrôler sa vie pendant la durée de cette prise en charge, la Cour d’appel a commis une erreur de droit. |
En ligne : | https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?idTexte=CETATEXT000032845203 |