Document public
Titre : | Ordonnance de référé relative au refus injustifié de délivrer un laissez-passer à un enfant dont la mère est suspectée d'avoir eu recours à une mère porteuse |
Titre suivant : | |
Auteurs : | Tribunal administratif de Paris, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 26/06/2016 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 1611459 |
Format : | 5 p. |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Titre de séjour [Mots-clés] État civil [Mots-clés] Gestation pour autrui (GPA) [Mots-clés] Maternité [Mots-clés] Filiation [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Intérêt supérieur de l'enfant [Mots-clés] Procédure de référé [Géographie] Arménie |
Résumé : |
La requérante a sollicité en vain la délivrance d’un document de voyage pour son nourrisson né en Arménie afin de pouvoir rentre en France avec lui.
Les autorités consulaires qui soupçonnent la requérante d’avoir eu recours à une mère porteuse considèrent que sa demande ne peut aboutir car l’acte de naissance arménien de l’enfant désigne l’intéressée comme étant la mère alors qu’elle n’a pas accouché de l’enfant. Les autorités font valoir que l’acte de naissance n’est pas conforme à l’article 47 du code civil et qu’au regard de la jurisprudence relative aux enfants issus de la gestation pour autrui, le lien de filiation n’est pas établi. L’enfant ne peut donc pas être considéré comme étant français et obtenir des documents français de voyage. La requérant demande au juge des référés d’ordonner aux autorités de délivrer un laissez-passer à l’enfant arguant notamment qu’elle ne pourra légalement demeurer en Arménie plus de 180 jours et que son enfant sera confié à l’orphelinat s’il n’obtient pas de document lui permettant de rejoindre la France avec sa mère. Le juge des référés considère que la condition d’urgence est remplie car il ne résulte pas de l’instruction que l’enfant, âgé d’un mois, serait effectivement susceptible, en cas de départ de la mère vers la France, d’être pris en charge, dans des conditions adaptées à son état, autrement que par un placement en orphelinat en Arménie. Ensuite, il tient compte de la filiation résultant de l’acte de naissance et considère que l’enfant est français conformément à l’article 18 du code civil. Il estime que la seule circonstance que la naissance d’un enfant à l’étranger aurait pour origine un contrat qui serait entaché de nullité au regard de l’ordre public français ne peut, sans porter une atteinte disproportionnée à ce qu’implique, en termes de nationalité, le droit de l’enfant au respect de sa vie privée, garanti par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, conduire à priver cet enfant de nationalité française à laquelle il a le droit, en vertu de l’article 18 précité et sous le contrôle de l’autorité judiciaire, lorsque sa filiation avec un Français est établie. En conséquence, le seul soupçon de recours à une convention portant sur la procréation ou la gestation pour autrui conclue à l’étranger ne peut suffire à opposer un refus aux demandes de certificats de nationalité française alors que ces conventions sont en France entachées de nullité d’ordre public, dès lors que les actes d’état civil local attestent du lien de filiation avec un Français, légalisés et apostillés sauf dispositions conventionnelles contraires, peuvent être, sous le contrôle de l’autorité judiciaire, regardés comme probants, au sens de l’article 47 du code civil. Le juge estime que les autorités qui n’apportent pas la preuve que l’acte de naissance serait irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondraient pas à la réalité, ont commis une erreur de droit au regard des dispositions de l’article 47 du code civil, en refusant de délivrer le laissez-passer. Selon le juge, le seul motif de refus de la demande de laissez-passer, fondé sur la circonstance que l’enfant est issu d’une convention de gestation pour autrui, ne saurait faire obstacle à la régularité et à la portée de la production du document demandé, ainsi que l’a jugé le Conseil d’Etat dans une décision portant sur la circulaire relative à la délivrance des certificats de nationalité françaises aux enfants nés à l’étranger. En conséquence, en refusant de délivrer le document de voyage pour le fils de la requérante, afin qu’elle puisse rentrer en France avec lui, le ministre doit être regardé comme ayant porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit de l’enfant au respect de sa vie privée et familiale et méconnu l’intérêt supérieur de l’enfant. Les autorités doivent délivrer le document de voyage dans un délai de sept jours. |
Documents numériques (1)
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