
Document public
Titre : | Arrêt relatif à l'entrave à l'exercice des droits de la défense en raison de l'irrecevabilité d'un appel pour non-respect des formalités : Duceau c. France |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 30/06/2016 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 29151/11 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Mots-clés] Justice [Mots-clés] Procédure pénale [Mots-clés] Droit à un procès équitable [Mots-clés] Justice judiciaire [Mots-clés] Avocat [Géographie] France |
Résumé : |
Le requérant avait porté plainte pour faux et usage de faux contre un huissier. Au cours de la procédure, il avait changé d'avocat lequel en avait informé le juge d'instruction. Dans un premier temps, le juge d'instruction a estimé que la désignation du nouvel avocat n'avait pas satisfait aux dispositions de l'article 115 du code de procédure pénale (CPP) et il avait donc refusé une mesure d'instruction complémentaire demandée par ce dernier.
Le requérant a alors informé, d'une part, le juge de l'instruction et, d'autre part, son greffier, de son changement d'avocat. Par la suite, dans son ordonnance de non-lieu, le juge d'instruction a relevé que le requérant avait finalement satisfait aux formalités de désignation de son nouvel avocat. L'appel interjeté par le requérant qui contestait l'ordonnance de non-lieu a été déclaré irrecevable. La Cour de cassation a rejeté le pourvoi du requérant en considérant que lorsque le recours exercé par le nouvel avocat du requérant a été exercé contre l'ordonnance de non-lieu, celui-ci n'avait pas fait l'objet d'une désignation régulière puisque le requérant avait porté cette information à la connaissance du juge d'instruction par la lettre recommandée avec accusé de réception et non par déclaration au greffe conformément à l'article 115 du CPP. Ce texte prévoit les différentes modalités imposées pour porter à la connaissance des autorités judiciaires la désignation d'un nouvel avocat durant l'instruction. Invoquant l'article 6§1 (droit à un procès équitable) de la Convention, le requérant se plaint du formalisme excessif pour la désignation d'un nouvel avocat ayant pour conséquence l'irrecevabilité de son appel et allègue notamment la violation de son droit d'accès à un tribunal. La CEDH rappelle que la réglementation relative aux formalités et aux délais à observer pour former un recours vise à assurer la bonne administration de la justice et le respect, en particulier, de la sécurité juridique. Les intéressés doivent pouvoir s'attendre à ce que les règles soient appliquées mais celles-ci ne devraient pas les empêcher d'utiliser une voie de recours disponible. En l'espèce, la CEDH observe tout d'abord que le juge d’instruction était parfaitement informé du changement d’avocat opéré durant l’instruction. Après avoir dans un premier temps jugé la désignation irrecevable, le juge d’instruction l’a ensuite validée, ainsi qu’en attestent expressément les termes de son ordonnance. La Cour note par ailleurs que dans son avis sur le pourvoi formé par le requérant, l’avocat général à la Cour de cassation a également souligné le fait que le nouvel avocat désigné était fondé à considérer que sa désignation était régulière. La CEDH relève que la décision d’irrecevabilité de la Cour d’appel, confirmée par la Cour de cassation, a été de nature à entraver l’exercice des droits de la défense, le requérant et son avocat ne pouvant plus, à ce stade, régulariser une désignation validée par le juge d'instruction. Cette désignation avait fait disparaître tout risque d'ambiguïté ou de confusion quant à la désignation de l'avocat. Le requérant a donc été privé d’un examen au fond de son recours. La Cour estime que, ayant notifié l’identité de son nouvel avocat au juge de l’instruction et à son greffier, le requérant s’est vu imposer une charge disproportionnée qui rompt le juge équilibre entre, d’une part, le souci légitime d’assurer le respect des conditions formelles pour désigner un nouvel avocat durant l’instruction et, d’autre part, le droit d’accès au juge. Elle conclut, à l'unanimité, qu'il y a eu violation de l'article 6§1 de la Convention. |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-164204 |