Document public
Titre : | Arrêt relatif au fait que la communauté de gens du voyage constitue un groupe en raison de leur origine |
Voir aussi : | |
Auteurs : | Cour d'appel d'Amiens, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 26/10/2015 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 1500108 |
Format : | 8 p. |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Origine [Mots-clés] Race, Ethnie [Mots-clés] Gens du voyage [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Commune [Mots-clés] Diffamation [Mots-clés] Infraction [Mots-clés] Responsabilité civile |
Résumé : |
En mars 2012, le maire d’une petite commune avait diffusé auprès de l’ensemble de ses administrés un tract émanant d’une association intitulé « infos à diffuser » qui listait « les codes de communication des gents (sic) du voyage qui leur permettent de commettre des délits sans difficultés et sans risques ». Il avait déclaré que son intention était seulement d’informer ses administrés.
Poursuivi pour la complicité de diffamation publique à caractère racial, le maire a été relaxé en première instance. Le tribunal correctionnel avait estimé que la communauté des gens du voyage ne saurait être considérée comme une ethnie et encore moins comme une race, de sort que les poursuites fondées sur l’article 32 de la loi de 1881 étaient inappropriées. Ainsi, les faits ne pouvant constituer qu’une diffamation ordinaire, soumise à la prescription de droit commun (trois mois) et non une diffamation à caractère discriminatoire soumise à une prescription dérogatoire d’un an. Il a constaté en l'espèce la prescription de l’action publique. Le juge avait débouté une association luttant contre le racisme de sa constitution de partie civile. Cette dernière avait interjeté appel sur les dispositions civiles du jugement. La Cour d’appel annule le jugement puisque le tribunal correctionnel avait statué à juge unique en violation du code de procédure pénale. Ensuite, la Cour d’appel considère que l’analyse du premier juge qui consiste à considérer que l’expression « gens du voyage » renvoie à un mode de vie itinérant, indépendamment de l’origine des personnes concernées, procède d’une construction administrative qui ne rend pas compte de l’homogénéité sociale, économique et culturelle des populations concernées et donc d’une origine commune. Elle ajoute que cette appartenance des gens du voyage à un ensemble de populations se définissant à partir de certains traits culturels communs est reconnue par les institutions internationales. La Cour d’appel estime que le tract diffusé par le maire auprès de ses administrés, en ce qu’il laisse entendre que tous les gens du voyage, sans distinction ni exception, commettent sans difficulté et sans risque des délits que facilite l’utilisation de certains signes, est de nature à porter atteinte à l’honneur ou à la considération de cette communauté et ne peut qu’avoir un retentissement négatif sur ses membres. Ces propos qui visent un groupe de personnes en raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie ont été rendus publics par le maire. La Cour considère que si le maire a peut-être eu en vue, en diffusant ce tract, de faire profiter ses administrés d’informations utiles, il ne pouvait ignorer, en sa qualité d’agent public chargé de respecter et faire respecter les valeurs républicaines, que les propos repris sans modification de sa part, de par leur généralité, étaient de nature à stigmatiser l’ensemble des gens du voyage assimilés à des voleurs. Elle ne retient pas l’excuse de bonne foi du maire et considère que ce dernier a commis une faute civile personnelle. Le maire est alors condamné à payer à l’association de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral porté aux intérêts qu’elle défend. Néanmoins, la Cour considère qu’au regard de circonstances particulières dans lesquelles les faits ont été commis et de la publicité limitée qui leur a été donnée, le dommage causé sera suffisamment réparé par l’octroi d’une indemnité de un euro. |
Documents numériques (1)
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