Document public
Titre : | Ordonnance de référé relative à la carence du département dans la prise en charge d’un mineur isolé étranger |
Auteurs : | Tribunal administratif de Lille, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 06/05/2016 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 1603112 |
Format : | 11 p. |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Accès à la prise en charge [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Protection de l'enfance [Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Mots-clés] Procédure de référé [Mots-clés] Mineur non accompagné [Mots-clés] Logement [Mots-clés] Vulnérabilité économique [Mots-clés] Mineur étranger [Mots-clés] Département [Géographie] Nord-Pas-de-Calais [Géographie] Nord |
Mots-clés: | hébergement |
Résumé : |
Le requérant, un jeune guinéen âgé de 17 ans, a été confié par le juge des enfants à l’aide sociale à l’enfance jusqu’à sa majorité. Malgré cette décision et plusieurs ordonnances de référés enjoignant au département de fournir un hébergement à l’intéressé, ce dernier vit dans un jardin public avec une soixantaine d’autres mineurs isolés étrangers dans des conditions précaires et insalubres.
Le mineur a donc de nouveau saisi le juge des référés. Il soutient que la carence des autorités publiques porte une atteinte grave et manifestement illégale à son droit à la protection de la santé et à son droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains et dégradants. Le département fait valoir notamment que le dispositif d’hébergement est totalement saturé. Le préfet invoque l’absence de capacité à agir du jeune devant le juge. Le juge des référés du tribunal administratif considère que si un mineur non émancipé ne dispose pas, en principe, de la capacité pour agir en justice, il peut toutefois être recevable à saisir le juge des référés lorsque des circonstances particulières justifient que le juge ordonne une mesure urgente dans le cadre de référé-liberté. Tel est notamment le cas lorsqu’un mineur isolé étranger sollicite un hébergement qui lui est refusé par le département, auquel le juge judiciaire l’a confié. Il précise qu’en l’absence de dispositions législatives spécifiques, les conditions dans lesquelles un mineur isolé étranger confié à l’aide sociale à l’enfance peut obtenir, la désignation d’un tuteur par le juge aux affaires familiales puis, celle d’un administrateur ad hoc, ne permettent pas de répondre à l’urgence qui justifie la saisine du juge du référé-liberté. Ensuite, le juge souligne que les mineurs isolés étrangers sont placés dans une situation d’extrême vulnérabilité. Il estime en particulier que la situation du requérant est constitutive d’un traitement inhumain et dégradant car ses besoins les plus élémentaires ne sont pas satisfaits. Le juge ajoute qu’il ne peut être reproché à l’intéressé de ne pas avoir sollicité l’asile en France aux seuls fins de bénéficier des droits qui s’attachent à la qualité de demandeur d’asile. Le juge déplore le manque de solidarité entre les départements, dont certains refusent de prendre en charge des mineurs isolés étrangers (MIE) en provenance d’autres départements. Toutefois, il considère qu’en l’espèce, le département qui invoque la saturation de son dispositif d’hébergement, n’établit pas que l’ampleur de ces flux massifs et croissants de MIE qui existent depuis plusieurs années ne pouvait pas être anticipée et les capacités d’accueil adaptées en conséquence. Et de toute manière, le département n’établit pas qu’aucune solution, même alternative en matière d’hébergement et de distribution de repas, ne pourrait être organisée, le cas échéant avec concours de l’État et de la ville. Ainsi, la carence prolongée du département caractérise une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Le juge ajoute que l’obligation particulière qui pèse sur les départements en matière d’accueil des personnes sans-abris et en détresse, n’exclut pas l’intervention supplétive des autorités de l’État qui ne peut légalement refuser de prendre les mesures d’urgence que la situation de MIE rendrait nécessaire, au seul motif qu’ils ont été confiés au département au titre de l’aide sociale à l’enfance. En conséquence, le juge enjoint au département de proposer au requérant une solution d’hébergement, incluant le logement et la prise en charge de ses besoins alimentaires quotidiens, dans un délai de 3 jours sous astreinte journalière graduée (de 500 à 2000 €). En cas de carence du département dans un délai de 15 jours, l’État devra assurer, sous astreinte, le logement du mineur et ses repas. En revanche, le juge rejette la demande du requérant qui sollicitait l’aménagement du jardin occupé par les MIE de la même manière que le campement de Calais (conteneurs et sanitaires). |
Cite : |
Documents numériques (1)
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