Document public
Titre : | Arrêt relatif au harcèlement moral discriminatoire d’un salarié privé de ses responsabilités alors qu’il était déclaré apte à son poste dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique |
Titre précédent : | |
Auteurs : | Cour d'appel de Paris, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 22/03/2016 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 14/04318 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Harcèlement moral [Mots-clés] État de santé [Mots-clés] Emploi privé [Mots-clés] Carrière [Mots-clés] Licenciement [Mots-clés] Entreprise [Mots-clés] Inaptitude [Mots-clés] Temps partiel [Mots-clés] Arrêt maladie |
Résumé : |
Le requérant était engagé par une société de conseil en management depuis juin 2000 en qualité de consultant puis de manager d’affaires. Il a été absent pendant près d’une année pour maladie.
En décembre 2011, le médecin de travail l’a déclaré apte à travailler dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique. Le salarié a saisi le juge prud'homal en demandant la résiliation judiciaire de son contrat de travail en faisant valoir qu’à compter de la reprise de son travail, il a été victime de harcèlement moral et de discrimination liés à son état de santé. Il soutient qu’il a été mis à l’écart et que ses responsabilité ont été réduites alors que, jusqu’à son arrêt maladie ses compétences étaient appréciées et reconnus par ses supérieurs hiérarchiques. Cette situation a entraîné une dégradation de ses conditions de travail et de son état de santé. Il a été de nouveau placé en arrêt de travail pendant plusieurs mois et en janvier 2013, le médecin du travail l’a déclaré inapte à son poste conformément à la procédure de « danger immédiat » en précisant que l’intéressé pourrait occuper un emploi similaire dans un tout autre contexte relationnel et organisationnel. Le salarié a été licencié en février 2013 pour inaptitude et impossibilité de reclassement. En février 2014, le Conseil de prud’hommes a débouté le salarié de toutes ses demandes. Il a estimé que le salarié n’établissait pas de faits laissant présumer l’existence d’un harcèlement. Le juge a notamment retenu que le salarié n’avait pas contesté sa situation de travail à mi-temps thérapeutique, ni s’était plaint d’une sous-activité ou d’une perte de responsabilité. Il a considéré que le salarié avait conservé le même niveau de rémunération qu’avant son passage à mi-temps thérapeutique. Il a estimé que l’état de santé de l’intéressé et l’organisation de son temps de travail ne lui permettaient plus de travailler comme s’il était à temps plein afin d’éviter des déplacements et le stress lié à la réalisation d’objectifs. Par ailleurs, le Conseil de prud’hommes a jugé que si le médecin du travail avait considéré que le salarié était victime de harcèlement moral lié à son état de santé, il n’aurait pas poursuivi le mi-temps thérapeutique visant à favoriser sa guérison. Enfin, le juge a considéré que le licenciement pour inaptitude était justifié et que l’employeur avait respecté son obligation de moyens en matière de reclassement. Saisi par le salarié en juin 2015, le Défenseur des droits avait adressé à l’employeur, sollicité à plusieurs reprises et n’ayant fournir aucun élément justifiant objectivement sa décision, un rappel à la loi en en matière de lutte contre les discriminations. Dans le courrier adressé au salarié, le Défenseur concluait que les faits pourraient être analysés comme constitutifs d'une discrimination eu égard aux pièces communiquées par le salarié. La Cour d’appel infirme le jugement prud’homal. Elle mentionne la lettre du Défenseur des droits en considérant que ce courrier ne peut constituer un élément probant en ce qu'il ne fait que fournir une analyse sur des faits non soumis contradictoirement à la partie adverse. La Cour considère que le salarié apporte des éléments de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral, de surcroît corroboré par des éléments de nature à laisser penser à l'existence d'une discrimination fondée sur l'état de santé. En revanche, l’employeur n’apporte aucun élément pour justifier de façon objective la réduction des responsabilités inhérentes au poste de manager d’affaires. La Cour souligne que l’employeur s’appuyait sur le nécessaire respect des contre-indications médicales, alors même que le médecin du travail, seul habilité à constater l’aptitude ou l’inaptitude d’un salarié à son poste, n’a posé aucune restriction médicale en décembre 2011, mis à part la réduction du temps de travail avec le passage à mi-temps thérapeutique. Ainsi, au regard des recommandations médicales, le salarié restait apte l'exercice des mêmes fonctions et l'employeur ne pouvait pas porter une appréciation contraire en l'absence de recommandations à cet égard de la médecine du travail. En conséquence, la résiliation judiciaire sollicitée par le salarié est fondée et elle produit les effets d’un licenciement nul qui prive de tout objet le licenciement prononcé par la société ultérieurement à la demande de résiliation judiciaire. La société est condamnée à verser à l’intéressé 40.000 € à titre d’indemnité pour licenciement nul et 10.000 € à titre des dommages-intérêts pour harcèlement moral et violation de l’obligation de sécurité de résultat. |
Visa du préjudice lié à la discrimination ? : | Non |
Qualification préjudice : | Licenciement nul;harcèlement moral discriminatoire |
Autres sommes allouées en lien avec la discrimination : | 50000 |
Nombre de mesures : | 2 |
Documents numériques (1)
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