Document public
Titre : | Arrêt relatif au refus de transcrire la filiation maternelle des enfants nés de la gestation pour autrui, la mère d'intention désignée dans l'acte de naissance étranger n'ayant pas accouché des enfants |
Voir aussi : | |
Auteurs : | Cour d'appel de Rennes, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 07/03/2016 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 15/03855 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Gestation pour autrui (GPA) [Mots-clés] Bioéthique [Mots-clés] Filiation [Mots-clés] Maternité [Mots-clés] Intérêt supérieur de l'enfant [Mots-clés] État civil [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Géographie] Ukraine |
Résumé : |
Un couple de français ayant eu recours à la gestation pour autrui en Ukraine s’est vu opposer le refus des autorités françaises de transcrire sur les registres de l’état civil consulaire les actes des naissances des jumelles nées en janvier 2011. Les actes de naissance ukrainiens désignent le couple comme étant père et mère.
Pour faire droit à la demande de transcription, le tribunal de grande instance a considéré que le fait que la mère d’intention soit portée à l’acte de naissance en tant que mère des enfants, alors qu’elle n’a pas accouché, ne saurait, au regard de l’intérêt des enfants, justifier le refus de reconnaissance de cette filiation dans la mesure où celle-ci est la seule juridiquement reconnue aux enfants comme régulièrement établie dans le pays de naissance. La Cour d’appel infirme le jugement sur ce point. Concernant la filiation maternelle, la Cour considère que la règle de conflit désigne la loi personnelle de la mère au jour de la naissance de l’enfant. En l’espèce, c’est la loi française qui s’applique, la mère d’intention étant française. Or la loi française considère comme mère celle qui est désignée dans l’acte de naissance, c’est-à-dire celle qui a accouché de l’enfant conformément à la maxime mater semper certa. La Cour estime que si l’établissement de la filiation maternelle de la mère d’intention par application de la loi compétente selon la règle de conflit est impossible en l’état du droit, seul le législateur étant habilité à fixer les règles concernant l’état de personnes, cette norme fait obstacle à la reconnaissance en droit interne d’un lien de filiation des enfants à l’égard de la mère d’intention qui n’est pas la mère biologique. La Cour rappelle que l’absence de transcription ne prive pas les enfants de la filiation maternelle que le droit ukrainien leur reconnaît, ni ne les empêche de vivre avec leur père et mère, cette dénomination étant mentionnée dans le certificat de nationalité française délivré aux enfants en mars 2013 conformément à la circulaire du 25 janvier 2013. Elle ajoute que seule dérogation légale permettant de désigner comme mère une femme n’ayant pas accouché d’un enfant est l’adoption plénière qui rompt le lien de filiation biologique. Ce dispositif permettant de consacrer une filiation dépourvue de réalité biologique résulte d’une fiction légale dans l’intérêt de l’enfant qui ne peut être transposée en l’espèce en l’absence de statut propre à l’enfant né d’une gestation pour autrui à l’étranger mais vivant en France. La Cour considère que par ailleurs, l’atteinte à l’intérêt supérieur de l’enfant et au respect de sa vie privée reste cantonnée selon la Cour européenne des droits de l’homme, au double refus de la transcription de la filiation paternelle et d’un mode d’établissement de la filiation à l’égard du père biologique selon le droit français, et non envers la mère d’intention et ne constitue donc pas une atteinte disproportionnée au droit à l’identité de l’enfant au sein de la société française. Quant à la transcription de la filiation paternelle, la Cour considère que la protection de la vie privée des enfants implique que ce lien soit établit sous peine de clandestinité juridique puisque ce lien est le seul juridiquement établit en droit français. Elle rappelle qu’il est désormais admis qu’une convention de gestation pour autrui conclue entre le parent d’intention et la mère porteuse, ne fait plus obstacle à la transcription de l’acte de naissance d’un enfant né à l’étranger issu d’une telle convention, dès lors que l’acte de naissance n’est ni irrégulier ni falsifié et que les faits qui y sont déclarés correspondent à la réalité, conformément à l’article 47 du code civil. Contrairement à ce que soutient le couple, il s’agit de la réalité juridique et non de la réalité factuelle. La Cour considère que la transcription sur les registres français de l’état civil, fût-elle facultative, est constitutive de l’un des éléments de la reconnaissance de la filiation à laquelle les enfants peuvent prétendre en qualité d’enfants d’un ressortissant français. En conséquence, elle considère qu’en l’espèce, qu’en absence d’indices de contrariété à l’article 47 du code civil, la transcription partielle des actes de naissance des enfants, consistant à supprimer la seule mention de la mère d’intention, doit être ordonnée. |
Note de contenu : | N.B.: Il s'agit d'une affaire médiatisée, le père des enfants qui avait tenté de les sortir illégalement de l'Ukraine en les cachant dans un camping-car a été condamné par le juge ukrainien au payement d'une amende. |
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