
Document public
Titre : | Ordonnance de référé relative à l'évacuation partielle de la zone "sud" du campement à Calais |
Titre précédent : | |
Auteurs : | Tribunal administratif de Lille, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 25/02/2016 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 1601386 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Défenseur des droits [Mots-clés] Mineur étranger [Mots-clés] Mineur non accompagné [Mots-clés] Migrant [Mots-clés] Procédure de référé [Mots-clés] Aire de campement [Mots-clés] Défenseur des enfants [Mots-clés] Maintien de l'ordre public [Mots-clés] Expulsion [Géographie] Nord-Pas-de-Calais [Géographie] Pas-de-Calais |
Résumé : |
Plusieurs associations et 160 migrants qui résident sur le site de la Lande à Calais demandent au juge des référés du tribunal administratif de suspendre l’exécution de l’arrêté préfectoral ordonnant aux occupants la libération de la zone « sud » de ce site pour des motifs d’ordre public.
Le juge des référés fait partiellement droit à cette demande. Tout d'abord, il considère qu’il résulte de l’instruction, et notamment de la visite sur les lieux effectuée le 23 février 2013, que la zone « sud » se caractérise par la présence, pour l’essentiel, d’un habitat à la fois dense et diffus constitué d’abris précaires réalisés avec des matériaux divers et de tentes, et d’installations plus pérennes destinées à des services de natures sociale, culturelle, médicale ou juridique et à l’accompagnement des populations les plus fragiles. A l’exception de bennes à ordures et de quelques latrines, elle ne comporte aucun aménagement contrairement à la zone « nord » où se situe un centre d’accueil provisoire, avec une capacité d’hébergement de nuit de 1.500 places, dont 300 sont actuellement disponibles, ainsi que un centre Jules Ferry situé à proximité qui comporte des sanitaires et un centre dédié à l’accueil de nuit des femmes isolés ou avec des enfants. Ce centre dispose d’installations permettant la préparation et la distribution de plus de 2.500 repas par jour. Le juge note que les migrants y disposent d’une offre de soins dispensée par la permanence d’accès aux soins et de santé, ainsi que d’une structure hospitalière destiné à accueillir des personnes nécessitant une surveillance médicale à la suite d’une hospitalisation. Il ressort par ailleurs du tableau produit par la préfète que 405 places sont actuellement disponibles dans divers centres d’accueil et d’orientation implantés sur le territoire national. Il considère que si les requérants font valoir que les modalités d’accueil et d’accompagnement dans ces centres ne seraient pas satisfaisantes, ils ne contestent pas utilement la réalité de ces données. Par ailleurs, il estime que contrairement à ce qu’ils soutiennent, le critère de la présence nocturne sur le site, est pertinent pour évaluer les besoins de relogement des migrants vivant dans cette zone. Le juge estime que la circonstance invoquée par les requérants qu’ils sont présents dans cette zone depuis des mois ou des années, ne leur confère aucun droit acquis au maintien dans cette situation irrégulière. En conséquence, il estime que compte tenu des conditions de vie des migrants dans la zone « sud » et des possibilités de relogement, notamment dans la zone « nord », les moyens tirés de la méconnaissance de la charte sociale européenne et des stipulations des articles 3 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, ne sont pas, en l’état de l’instruction, de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de l’arrêté attaqué. Il en est de même concernant le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l’article 3-1 de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant quant à la prise en charge des mineurs isolés étrangers présents sur le site. Le juge se réfère notamment au communiqué de presse du Défenseur des droits suite à la visite effectuée sur place le 22 février par la Défenseure des enfants. Le juge note que cette dernière a observé que « les familles peuvent être mises à l’abri » dans les deux centres et a constaté « les efforts effectués pour organiser un espace d’accueil de jour pour les enfants ». En outre, la Défenseure a noté que « les structures sont loin d’être remplies ». Le juge considère que si la Défenseure des enfants demeure préoccupée par la situation de ces mineurs et l’absence de visibilité sur leur prise en charge, et qu’elle recommande une nouvelle fois avec insistance « l’ouverture immédiate d’un dispositif de mise à l’abri inconditionnelle sur le site à destination de ces mineurs », il ne résulte pas de l’instruction que le maintien de ces mineurs dans la zone « sud » serait de nature à répondre à ces préoccupations et à leur assurer une meilleure prise en charge. Ensuite, le juge prend en compte le fait que les tentatives de pénétration sur la rocade portuaire par les migrants perdurent, que les riverains sont régulièrement victime de dégradations de leurs biens et que des affrontements entre les forces de l’ordre et les migrants se répètent. Par ailleurs, il considère que l’intrusion de passeurs dans la partie « sud » de la zone, non sécurisée, constitue également un danger potentiel pour les migrants. Il considère que la décision d’évacuer cette zone dans le but de prévenir des troubles à l’ordre public et d’assurer la sécurité des migrants eux-mêmes en regroupant leur hébergement sur la zone « nord » dont les caractéristiques permettent une meilleure sécurisation, n’apparaît pas en l’état de l’instruction disproportionnée au regard des buts poursuivis. En revanche, les requérants sont fondés à obtenir la suspension de la décision contestée en tant qu’elle porte sur les « lieux de vie » (école, bibliothèque, théâtre, espace d’accès au droit, etc.), aménagés de manière pérenne par les associations humanitaires en vue d’offrir aux habitants de la zone des services à caractère social ou culturel. |
Note de contenu : | Un pourvoi en cassation a été formé devant le Conseil d’État. |
En ligne : | http://lille.tribunal-administratif.fr/content/download/56106/498105/version/1/file/Ordonnance%20de%20r%C3%A9f%C3%A9r%C3%A9%20n%C2%B0%201601386...pdf |