Document public
Titre : | Ordonnance de référé relative au délai excessif pour enregistrer la demande d'asile portant atteinte à la liberté fondamentale |
Voir aussi : | |
Auteurs : | Tribunal administratif de Paris, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 28/01/2016 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 1601172 |
Format : | 4 p. |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] Paris [Mots-clés] Asile [Mots-clés] Relation des usagers avec les services publics [Mots-clés] Procédure de référé [Mots-clés] Préfecture [Mots-clés] Délais anormaux |
Résumé : |
Le requérant, ressortissant afghan est entré irrégulièrement en France le 30 décembre 2015. Après avoir été libéré d’un centre de rétention, il s’était présenté, le 13 janvier 2016, dans les locaux d’une association, chargée par l’Etat, dans le cadre d’un marché public, d’assurer notamment l’accueil des demandeurs d’asile. Il a obtenu une convocation l’invitant à se présenter à nouveau dans ces locaux le 18 avril prochain pour l’enregistrement de sa demande d’asile.
Il a saisi le juge des référés en vue d’enjoindre au préfet d’enregistrer sa demande d’asile dans un délai de trois jours ouvrés. Il allègue que l’impossibilité d’enregistrer sa demande d’asile avant trois mois a des conséquences graves sur sa situation puisqu’il ne peut bénéficier des mesures prévues par la loi pour l’accueil des demandeurs d’asile. Le préfet invoque notamment le volume exceptionnel du flux d’étrangers demandant l’asile à la fin de l’année, ce qui ne permet pas d’enregistrer les demandes d’asile dans des délais satisfaisants. Il soutient en outre que l’urgence n’est pas caractérisée dès lors que l’intéressé peut bénéficier des services d’urgence aux services des sans-abris. Le juge des référés énonce que le droit d’asile, qui a le caractère d’une liberté fondamentale, a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié. Ce droit implique, s’agissant des étrangers qui sont présents sur le territoire français sans avoir déjà été admis à résider en France, l’enregistrement des demandes d’asile par l’autorité compétente dès lors que ces demandes sont assorties des indications et documents requis par l’article R.741-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA). Le juge considère que l’article L.741-1 du CESEDA, dans sa rédaction issue de la loi du 29 juillet 2015, fait obligation aux services préfectoraux d’enregistrer les demandes d’asile dans un délai de 3 jours ouvrés pouvant être porté à 10 jours ouvrés lorsqu’un nombre élevé d’étrangers demande simultanément asile. Le fait de différer au-delà du délai de 10 jours ouvrés, en violation de ces dispositions, l’enregistrement d’une demande d’asile, qui fait obstacle à l’examen de cette dernière et prive donc l’étranger du droit d’être autorisé à demeurer sur le territoire jusqu’à ce qu’il ait été statué sur sa demande, porte par lui-même une atteinte suffisamment grave et immédiate à la situation du demandeur pour que la condition d’urgence soit remplie. Il considère que si un nombre important de demandes d’asile au cours d’une même période peut, dans certaines conditions, être de nature à lever cette présomption d’urgence, il ne ressort pas des chiffres indiqués par le préfet (5710 demandes présentées sur 5 derniers mois de l’année 2015 contre 3132 pour la même période en 2014), que ces circonstances particulières feraient, en l’espèce, obstacle à ce que la condition d’urgence soit regardée comme remplie. En conséquence, compte tenu de l’importance du délai en cause, largement supérieur à 10 jours ouvrés prévus par la loi, lorsqu’un nombre élevé d’étrangers demande simultanément l’asile, avant l’enregistrement effectif de la demande d’asile du requérant, délai au cours duquel ce dernier est privé des garanties, notamment matérielles, offertes aux demandeurs d’asile, le préfet, dans les circonstances particulières de l’espèce, doit être regardé comme ayant porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale que constitue le droit d’asile. |
Documents numériques (1)
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