Document public
Titre : | Décision MLD-2016-007 du 12 février 2016 relative au refus d’ouvrir des comptes bancaires aux personnes de nationalité américaine ou résidant aux États-Unis |
Voir aussi : | |
est cité par : | |
Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Accès aux biens et services privés (2011-2016), Auteur |
Type de document : | Décisions |
Année de publication : | 12/02/2016 |
Numéro de décision ou d'affaire : | MLD-2016-007 |
Note générale : | Délai 12 mai 2016 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Documents internes] Recommandation [Documents internes] Recommandation individuelle et générale [Documents internes] Rappel des textes [Documents internes] Position partiellement suivie d’effet [Documents internes] Proposition de réforme [Documents internes] Règlement en droit [Géographie] Outre-mer [Géographie] Etats-Unis [Mots-clés] Nationalité [Mots-clés] Lieu de résidence [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Établissement bancaire [Mots-clés] Droit au compte [Mots-clés] Origine [Mots-clés] Race, Ethnie [Mots-clés] Biens et services |
Résumé : |
Le Défenseur des droits a été saisi de réclamations relatives à des clôtures de comptes bancaires décidées par un établissement de crédit en raison de la double nationalité franco-américaine des réclamants. Le mis en cause justifie ces décisions par l’application de la loi américaine FATCA.
Cette loi, qui a pour objet de renforcer la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales internationales, impose à tous les établissements financiers du monde de transmettre automatiquement aux États-Unis des informations sur les revenus et les actifs de leurs contribuables. Un accord a été signé entre la France et les États-Unis le 14 novembre 2013 afin de permettre l’échange d’informations entre les autorités françaises et américaines. Cette réglementation implique pour les établissements de crédits français d’identifier les clients soumis à déclaration afin que les données financières recueillies soient transmises à l’administration fiscale américaine. Il ressort des constatations du Défenseur des droits que le formulaire mis en ligne par l’établissement de crédit mis en cause pour les demandes d’ouverture de compte ne propose pas la nationalité américaine parmi les diverses nationalités sélectionnables. De même, il a été constaté que le formulaire imprimable de demande d’ouverture de compte exige du titulaire qu’il déclare ne pas être citoyen américain ou résident fiscal américain. Cette pratique qui revient à subordonner la fourniture d’un bien et d’un service à une condition fondée sur la nationalité des personnes est contraire aux articles 225-1 et 225-2 du code pénal qui interdisent les discriminations. Le Défenseur des droits décide de recommander à l’établissement de crédit de modifier ses procédures d’ouverture de compte afin de permettre la souscription à toute personne quelle que soit sa nationalité ou son lieu de naissance. |
Recommandation de réforme : | Il demande également au ministre de l’Économie de procéder à l’analyse de l’impact de la règlementation FATCA sur les politiques commerciales des institutions financières françaises à l’égard des clients de nationalité américaine, des binationaux et des Français résidant aux États-Unis et de l’informer des mesures qu’il entend prendre pour prévenir les refus d’ouverture de compte et les résiliations décidées par des établissements de crédit en considération de la nationalité ou du lieu de résidence. |
Nombre de mesures : | 3 |
Suivi de la décision : |
Le 15 juin 2016, l’établissement répondait au Défenseur des droits sur la mise en œuvre de la réglementation FATCA : "Cette mise en œuvre aurait nécessité des modifications importantes de nombreux composants de notre système d’information (progiciel de suivi de la relation clients, progiciels d’octroi et de gestion des comptes, …) dont notamment ceux nécessaires pour la production et la transmission à l’administration fiscale des informations attendues sur l’ensemble des clients concernés, avec des coûts financiers estimés à plus d’un million d’euros, comprenant également ceux relatifs à la mise en place des procédures correspondantes et leurs mises à jour et contrôles réguliers." Dans sa réponse à la décision du Défenseur des droits, l'établissement évoquait également sa procédure de demande d’ouverture de compte. Sans reconnaître avoir volontairement exclu les États-Unis de la liste des pays pouvant être sélectionné s’agissant du pays de naissance, du pays de résidence ou de la nationalité, l'établissement écrivait au Défenseur des droits : "Vous attirez notre attention sur l’insuffisance des informations données à la clientèle concernant l’application de la réglementation FATCA et sur la nécessité d’adapter nos formulaires de demande d’ouverture de compte. Nous vous informons que nous étudions actuellement les conditions dans lesquelles ces ajustements pourront être réalisés dans un calendrier d’ores et déjà fixé au premier trimestre 2017." Le 6 juillet 2017, un agent du Défenseur des droits constatait que le formulaire en ligne d’accès avait été modifié de telle sorte que désormais les clients de nationalité ou double nationalité américaine pouvaient souscrire un compte. Il est désormais possible pour une demande d’ouverture de compte bancaire de l'établissement de préciser États-Unis pour Pays de naissance et Nationalité. Il est précisé plus bas sur le formulaire en ligne : « Lors de la signature de votre demande, vous devrez attester ne pas être soumis à la fiscalité américaine au sens de la réglementation FATCA." S’agissant des informations demandées, il est désormais prévu l’information « fiscalité ». Le demandeur doit cocher les cases correspondant aux affirmations suivantes : -Je déclare être résident fiscal français et ne pas être résident fiscal d’un autre pays -Je déclare ne pas être soumis à la fiscalité américaine au sens de réglementation FATCA Enfin, il n’est plus possible pour les personnes ne résidant pas en France métropolitaine d’utiliser le formulaire en ligne. En effet, le seul pays qui peut être renseigné pour l’information « Coordonnées » est : « France ». Il est précisé sur le site : « Si vous résidez dans un DOM/TOM ou à l’étranger vous ne pouvez pas souscrire en ligne, veuillez contacter un conseiller au X ». Le 6/07/2017, un agent du Défenseur des droits a contacté ce numéro et le conseiller de l'établissement a confirmé qu’il n’était pas possible pour une personne résidant dans les régions et départements d’Outre-mer de souscrire un compte bancaire. La position actuelle de l'établissement de crédit qui accepte désormais les citoyens américains lorsqu’ils sont contribuables français et non contribuables US soumis à déclaration, ne relève pas de la discrimination fondée sur la nationalité dans la mesure où l’intention de l'établissement n’est pas d’exclure sur le fondement de la nationalité mais celui de la résidence fiscale et de l’obligation de déclaration. Interprétation stricte du code pénale. En revanche, cette pratique pourrait relever des dispositions de loi n°2008-496 du 27 mai 2008 qui interdit les discriminations indirectes fondées sur la nationalité. Au vu de ce qui précède : la recommandation adressée à l'établissement a été suivie d’effet. |
Suivi des réformes : |
A ce jour, le ministère de l’Économie n’a pas répondu au Défenseur des droits. Alors qu’il n’était pas destinataire des recommandations mais simplement informé de la décision, le ministre des Affaires étrangères a adressé un courrier au Défenseur des droits. Dans ce courrier daté du 7 septembre 2016, le ministre dans un premier temps rappelait l’intérêt de l’accord FATCA : « Cet accord nous apporte en retour un échange automatique d’informations – et non plus sur demande – à notre bénéfice sur les comptes bancaires des contribuables français ». Il ajoutait : "Toutefois, le ministère des Affaires étrangères et du Développement international est pleinement conscient des difficultés que pose cet accord pour les binationaux franco-américains. Mes services ont eu l’occasion de répondre à plusieurs courriers de députés et de particuliers sur les conséquences de l’accord FATCA. […] Une démarche a également été effectuée auprès de l’ambassade des États-Unis à paris le 3 février 2016 au cours de laquelle la problématique du droit au compte a été évoquée. Il a été demandé à notre ambassade à Washington d’effectuer une démarche auprès des autorités américaines pour leur signaler les difficultés rencontrées par les franco-américains dans le cadre de l’application de la loi américaine « FATCA »." Aucune mesure concrète n'est envisagée par les autorités françaises pour mesurer l’impact de l’accord FATCA ou prévenir les discriminations. |
Documents numériques (1)
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