Document public
Titre : | Arrêt relatif à la surveillance secrète arbitraire et abusive des communications de téléphonie mobile en Russie : Zakharov c. Russie : Zakharov c. Russie |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 04/12/2015 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 47143/06 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Sécurité publique [Mots-clés] Opérateur de télécommunication [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Surveillance [Géographie] Russie |
Résumé : |
L’affaire concerne le système d’interception secrète des communications de téléphonie mobile en Russie.
Le requérant, rédacteur en chef d’une maison d’édition, alléguait en particulier que les opérateurs de réseaux mobiles en Russie étaient tenus en vertu de la loi d’installer un dispositif permettant aux organes d’application des lois de mener à bien des mesures opérationnelles d’investigation et que, en l’absence de garanties suffisantes en droit russe, ce système rendait possible l’interception généralisée des communications. La CEDH juge à l'unanimité à la violation de l'article 8 (droit au respect de la vie privée et de correspondance) de la Convention européenne des droits de l'homme. La Cour juge que le requérant est en droit de se prétendre victime d’une violation de la Convention européenne bien qu’il ne puisse alléguer avoir fait l’objet d’une mesure concrète de surveillance. Eu égard au défaut de recours au niveau national ainsi qu’au caractère secret des mesures de surveillance et au fait que celles-ci touchent tous les usagers des services de communications de téléphonie mobile, la Cour estime justifié d’examiner la législation pertinente dans l’abstrait, et non du point de vue d’un cas spécifique de surveillance dont le requérant aurait été victime. En outre, la Cour considère que le requérant n’a pas à prouver fût-ce qu’il était exposé au risque de voir intercepter ses communications. En effet, dès lors que l’ordre interne n’offre pas de recours effectif à la personne qui pense avoir fait l’objet d’une surveillance secrète, la simple existence de la législation incriminée constitue en soi une ingérence dans l’exercice par le requérant de ses droits découlant de l’article 8. La Cour note que l’interception de communications poursuit les buts légitimes que sont la protection de la sécurité nationale et de la sûreté publique, la prévention des infractions pénales et la protection du bien-être économique du pays. Elle doit toutefois se convaincre de l’existence de garanties adéquates et effectives contre les abus car un système de surveillance secrète destiné à protéger la sécurité nationale risque de saper, voire de détruire, la démocratie au motif de la défendre. La Cour conclut que les dispositions du droit russe régissant l’interception de communications ne comportent pas de garanties adéquates et effectives contre l’arbitraire et le risque d’abus inhérent à tout système de surveillance secrète, risque qui est particulièrement élevé dans un système tel que celui de la Russie, où les services secrets et la police jouissent grâce à des moyens techniques d’un accès direct à l’ensemble des communications de téléphonie mobile. Plus particulièrement, la Cour constate des défaillances du cadre juridique dans les domaines suivants : les circonstances dans lesquelles les pouvoirs publics peuvent recourir à des mesures de surveillance secrète ; la durée de ces mesures, notamment les circonstances dans lesquelles elles doivent être levées ; les procédures relatives à l’autorisation de l’interception ainsi qu’à la conservation et à la destruction des données interceptées ; le contrôle des interceptions. De plus,l’effectivité des recours permettant de se plaindre de l’interception de communications est compromise par le fait qu’ils sont ouverts uniquement aux personnes qui sont à même de prouver l’interception, et par le fait que l’obtention d’une telle preuve est impossible en l’absence de tout système de notification ou de possibilité d’accès aux informations sur les interceptions. |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-159340 |