Document public
Titre : | Ordonnance de référé relative à l’état d’urgence décrété en 2005 |
Voir aussi : | |
Auteurs : | Conseil d'État, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 14/11/2005 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 286835 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Perquisition [Mots-clés] Procédure de référé [Mots-clés] État d'urgence [Mots-clés] Assignation à résidence |
Résumé : |
A la suite des violences urbaines ayant eu lieu fin octobre 2005, un état d’urgence a été déclaré sur le territoire métropolitain.
Les requérants demande au juge des référés du Conseil d’Etat d’ordonner la suspension du décret n° 2005-1386 du 8 novembre 2005 portant application de la loi du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence ainsi que du décret n° 2005-1387 du 8 novembre relatif à l’application de cette loi. Le juge des référés du Conseil d’Etat rejette la requête, les moyens invoqués n’étant pas de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité des décrets litigieux. Il considère que le décret par lequel le Président de la République déclare l'état d'urgence en vertu de la loi du 3 avril 1955 n'est pas un acte de gouvernement dès lors que l'intervention du Parlement appelé à décider de la prorogation de ce régime d'exception n'est pas certaine au moment de l'édiction du décret. Le juge administratif est dès lors compétent pour en connaître. Concernant les moyens propres au décret n° 2005-1386, le juge considère que loi du 3 avril 1955 a eu pour objet de permettre aux pouvoirs publics de faire face à des situations de crise ou de danger exceptionnel et imminent qui constituent une menace pour la vie organisée de la communauté nationale. Dans son texte initial, l'appréciation à porter sur l'opportunité de sa mise en œuvre était réservée à la représentation nationale. Sous l'empire du texte présentement en vigueur, la responsabilité de ce choix incombe au chef de l'Etat, sous réserve, en cas de prorogation au-delà du délai de douze jours de ce régime, de l'intervention du Parlement. Il s'ensuit que le Président de la République dispose d'un pouvoir d'appréciation étendu lorsqu'il décide de déclarer l'état d'urgence et d'en définir le champ d'application territorial. Le juge de d'excès de pouvoir n'exerce dès lors qu'un contrôle restreint en la matière. Il considère que dans ce contexte et eu égard à l'aggravation continue depuis le 27 octobre 2005 des violences urbaines, à leur propagation sur une partie importante du territoire et à la gravité des atteintes portées à la sécurité publique, ne peuvent être regardés comme étant propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de ce décret, les moyens tirés par le requérant de ce que la déclaration de l'état d'urgence n'était pas nécessaire sur l'ensemble du territoire métropolitain, de ce que la pratique suivie depuis l'adoption de la loi de 1955 conduit à limiter la mise en œuvre de l'état d'urgence à des situations de guerre civile ou de tentative de coup d'Etat et enfin, de la méconnaissance du principe de proportionnalité dès lors que l'autorité de police n'a pas épuisé tous les autres moyens à sa disposition. En ce qui concerne le décret n° 2005-1387, le juge considère qu’eu égard tout à la fois à la circonstance que les mesures dont l'application est autorisée ce décret ont pour fondement une loi dont il n'appartient pas à la juridiction administrative d'apprécier la constitutionnalité, à la limitation de leur application aussi bien dans le temps que dans l'espace ainsi qu'au contrôle dont leur mise en œuvre est assortie, le moyen tiré du défaut de proportionnalité entre les mesures autorisées au titre de l'état d'urgence et la situation du pays n'est pas de nature à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité du décret litigieux. Au titre du contrôle s'exerçant sur les mesures individuelles prises dans le cadre du régime d'état d'urgence, il convient de noter, d'une part, que les décisions d'interdiction de séjour ou d'assignation à résidence doivent pouvoir faire l'objet d'un recours gracieux examiné par une commission départementale où siègent des représentants du conseil général et, d'autre part, que l'exercice par le ministre ou le préfet de missions relevant de la police judiciaire, telles que les perquisitions à domicile, demeure soumis au contrôle de l'autorité judiciaire. Enfin, le juge estime que dès lors que l'article 1er du code civil permet l'entrée en vigueur d'un décret dès sa publication, le moyen tiré de ce que les décrets litigieux n'auraient pu prévoir leur entrée en vigueur dès zéro heure le jour de leur publication n'est pas de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de ces décrets. |
En ligne : | http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?idTexte=CETATEXT000008255110 |