Document public
Titre : | Décision relative à l'anonymat des donneurs des gamètes |
Auteurs : | Conseil d'État, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 12/11/2015 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 372121 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Droit du patient [Mots-clés] Bioéthique [Mots-clés] Dossier médical [Mots-clés] Discrimination non caractérisée [Mots-clés] Règlementation des services publics [Mots-clés] Don de gamètes [Mots-clés] Anonymat [Mots-clés] Accès aux origines [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Situation de famille [Mots-clés] Communication de documents administratifs |
Résumé : |
Le Conseil d’Etat estime que la règle d’anonymat des donneurs des gamètes n’est pas incompatible avec les dispositions de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, le législateur ayant établi un juste équilibre entre les différents intérêts en présence.
Le Conseil d’Etat estime que s’agissant des données identifiantes, la règle d’anonymat répond à l’objectif de préservation de la vie privée du donneur et de sa famille. Il ajoute que si cette règle, applicable à tous les dons d’un élément ou d’un produit du corps, s’oppose à la satisfaction de certaines demandes d’information, elle n’implique par elle-même aucune atteinte à la vie privée et familiale de la personne ainsi conçue, d’autant qu’il appartient aux seuls parents de décider de lever ou non le secret sur sa conception. Il considère qu’écartant, lors de l’adoption de la loi de 2011 relative à la bioéthique toute modification de la règle de l’anonymat, le législateur s’est fondé sur plusieurs considérations d’intérêt général, notamment la sauvegarde de l’équilibre des familles et le risque majeur de remettre en cause le caractère social et affectif de la filiation, le risque d’une baisse substantielle des dons de gamètes, ainsi que celui d’une remise en cause de l’éthique qui s’attache à toute démarche de don d’éléments ou de produits du corps. Quant au l’accès aux informations non identifiantes (de nature médicale), le législateur a entendu assurer la protection de la santé des personnes issues d’un don de gamètes, tout en garantissant le respect des droits et libertés d’autrui. Il précise que les dispositions selon lesquelles un médecin peut accéder aux informations médicales non identifiantes en cas de nécessité thérapeutique doivent s’entendre comme ne faisant pas obstacle à ce que de telles informations soient obtenues à des fins de prévention, en particulier dans le cas d’un couple de personnes issues l’une et l’autre de dons de gamètes. Le Conseil d’Etat estime que si ces données ne sont accessibles qu’au médecin et non à la personne elle-même, la conciliation des intérêts en cause ainsi opérée et la différence de traitement entre le médecin et toute autre personne relèvent de la marge d'appréciation que les stipulations de l’article 8 de la Convention européenne réservent au législateur national, eu égard notamment aux inconvénients que présenterait la transmission de ces données aux intéressés eux-mêmes par rapport aux objectifs de protection de la santé, de préservation de la vie privée et de secret médical. Enfin, le Conseil estime que si l’article 14 de la Convention précitée interdit, dans la jouissance des droits et libertés reconnus par la convention, de traiter de manière différente, sauf justification objective et raisonnable, des personnes placées dans des situations comparables, l’enfant issu d’un don de gamètes ne se trouve dans une situation analogue, et par suite comparable, ni à celle des enfants du donneur de gamètes, ni à celle des enfants du couple receveur. En conséquence, aucune discrimination, au sens de ces stipulations, ne frappe l’enfant issu d’un don de gamètes en matière d’accès à de telles données. |
En ligne : | http://www.conseil-etat.fr/Decisions-Avis-Publications/Decisions/Selection-des-decisions-faisant-l-objet-d-une-communication-particuliere/CE-12-novembre-2015-Mme-B |