Document public
Titre : | Jugement de départage relatif aux faits de harcèlement moral discriminatoire lié à l'état de grossesse de la salariée et ayant pour objet la modification imposée de son contrat de travail |
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Auteurs : | Conseil de prud'hommes de Tarbes, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 06/03/2017 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 15/00067 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Emploi [Mots-clés] Emploi privé [Mots-clés] Profession libérale [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Harcèlement [Mots-clés] Harcèlement moral [Mots-clés] Grossesse [Mots-clés] Licenciement |
Résumé : |
En septembre 2012, après un CDD d’un an en tant que cadre autonome, la requérante a été embauchée en CDI en qualité de vétérinaire avec le statut cadre intégré ayant une durée de travail de 35 heures hebdomadaires sur quatre jours, outre les astreintes. Après une scission de clientèle opérée par l’employeur un an plus tard, le contrat de travail de la salariée a été transféré à l’une des structures nouvellement crées. Deux mois plus tard, en mars 2013, la salariée a annoncé son état de grossesse à l’employeur. Placée en arrêt maladie en juin 2013 puis congé maternité, elle a repris le travail en janvier 2014. Elle a fait l’objet de plusieurs mesures disciplinaire entre juillet 2013 et juillet 2014. Placée en arrêt maladie dès juillet 2014 et souffrant d’une dépression réactionnelle, la salariée a été licenciée en novembre 2014 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
La salariée soutient notamment qu’à partir de l’annonce de sa grossesse, ses employeurs ont souhaité modifier son contrat de travail s’agissant du nombre d’heures effectuées et son lieu d’habitation. Elle a reçu des nombreux courriers de l’employeur lui demandant de prendre à ses frais un logement et de déménager afin d’assurer au mieux ses gardes. Le Défenseur des droits a décidé, après enquête, de présenter ses observations devant le Conseil de prud’hommes. Il constate que la salariée a subi des faits de harcèlement moral discriminatoire à raison de sa grossesse et de son sexe, que le changement de ses fonctions à son retour de congé de maternité a un caractère discriminatoire et que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité de résultat. Il conclut que le licenciement qui s’inscrit dans le cadre du harcèlement doit être sanctionné par la nullité. Le Conseil de prud’hommes constate qu’avant l’annonce de la grossesse de la salariée aucune difficulté n’existait dans les relations avec les employeurs ni quant aux termes du contrat, ni quant aux modalités de son exécution. Le Conseil considère que le fait d’exiger par lettre recommandée, qui n’est pas un mode normal de communication employeur-salarié, et par réunion pendant le congé maternité de la salariée, et de façon réitérée, pendant et après le congé maternité, la modification du lieu d’exercice de sa prestation de travail ne peut correspondre au pouvoir de direction de l’employeur et à un mode normale d’utilisation de ce pouvoir. Par ailleurs, il s’interroge sur la circonstance que l’employeur a tenté d’imposer ces modifications à compter de mai 2013 et non janvier 2013 au moment de la scission et avant d’avoir connaissance de la grossesse de la salariée. De même, l’employeur aurait pu licencier la salariée en raison de son refus de modifier son contrat de travail en indiquant en quoi ce refus était de nature à désorganiser l’entreprise. En effet, ce motif était avancé pour imposer la modification du contrat de travail alors que l’employeur ne l’a pas utilisé ultérieurement pour licencier la salariée. Ensuite, la salariée n’a pas retrouvé son précédent emploi ou un emploi similaire au retour de son congé maternité, les tâches qui lui étaient confiés ne correspondaient pas à celles qu’elle assurait antérieurement à son congé maternité. Elle a été mise à l’écart à son retour de congé maternité. Le Conseil de prud’hommes considère que les sanctions disciplinaires dont la salariée à fait l’objet sont injustifiées. Il note que l’avis d’inaptitude porte non sur la fonction de vétérinaire mais sur la nécessité d’un poste sans relations fonctionnelles avec les vétérinaires associés du groupe et constate que l’employeur n’a pas pris des mesures pour protéger la santé physique et mentale de la salariée. Il conclut que l’intéressée a été victime d’actes de harcèlement moral discriminatoire dont l’objet était d’obtenir son accord à la modification substantielle de son contrat de travail aux conditions voulues par son nouvel employeur et sans contrepartie pour elle, ce qui a conduit à la dégradation de ses conditions de travail. Il ajoute que l’inaptitude de la salariée ainsi que l’absence de son reclassement sont la conséquence des faits de harcèlement moral et de discrimination. En conséquence, le juge prud’homal prononce la nullité du licenciement. La salariée obtient 15.000 € de dommages et intérêts pour licenciement abusif. |
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Documents numériques (1)
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