
Document public
Titre : | Arrêt relatif à la violation du droit au respect de la vie familiale d'une mère dont les enfants ont été déclarés adoptables : S.H. c. Italie |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 13/10/2015 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 52557/14 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Maintien des liens [Mots-clés] Protection de l'enfance [Mots-clés] Parent [Mots-clés] Placement [Mots-clés] Situation de famille [Mots-clés] Famille d'accueil [Mots-clés] Adoption [Mots-clés] Mesure et sanction éducative [Géographie] Italie |
Résumé : |
La requérante, mère de trois enfants, reproche aux autorités italiennes d’avoir déclaré ses enfants adoptables alors qu’il n’existait aucune situation d’abandon en l’espèce, mais seulement des difficultés familiales transitoires, liées à sa pathologie dépressive et à l’interruption de sa cohabitation avec le père des enfants, difficultés qui pouvaient être surmontées avec la mise en place d’un parcours de soutien avec l’aide des services sociaux.
Elle souligne que les autorités internes ont coupé tout lien avec ses enfants alors que l’expertise avait établi que d’autres mesures visant à sauvegarder le lien familial pouvaient être adoptées en l’espèce. De ce fait, elle estime que les autorités internes ont manqué à leur obligation positive de déployer tous les efforts nécessaires afin de sauvegarder le lien parents-enfants, inhérent à l’article 8 de la Convention protégeant le droit au respect de la vie privée et familiale. La CEDH considère qu’en l’espèce, il s’agit de savoir si, avant de supprimer le lien de filiation maternelle, les autorités nationales ont bien pris toutes les mesures nécessaires et adéquates que l’on pouvait raisonnablement exiger d’elles pour que les enfants puissent mener une vie familiale normale au sein de leur propre famille. La Cour rappelle que pour un parent et son enfant, être ensemble représente un élément fondamental de la vie familiale et que des mesures aboutissant à briser les liens entre un enfant et sa famille ne peuvent être appliquées que dans des circonstances exceptionnelles. La Cour souligne également que l’article 8 de la Convention impose à l’État de prendre les mesures propres à préserver, autant que possible, le lien mère-enfant. La Cour note qu’en l’espèce, alors que des solutions moins radicales étaient disponibles, les juridictions internes ont néanmoins déclaré les enfants adoptables en dépit des préconisations de l’expertise, provoquant ainsi l’éloignement définitif et irréversible de leur mère. De plus, les trois enfants ont été placés dans trois familles d’accueil différentes, de sorte qu’il y a eu éclatement non seulement de la famille mais encore de la fratrie. La Cour est d’avis que la nécessité, qui était primordiale, de préserver, autant que possible, le lien entre la requérante – laquelle se trouvait par ailleurs en situation de vulnérabilité – et ses fils n’a pas été prise dûment en considération. Les autorités judiciaires se sont bornées à prendre en considération les difficultés de la famille, qui auraient pu être surmontées au moyen d’une assistance sociale ciblée, comme indiqué par ailleurs dans l’expertise. S’il est vrai qu’un premier parcours de soutien avait été mis en place en 2009 et avait échoué à cause de l’aggravation de la maladie de la requérante et de la cessation de la cohabitation avec son mari, ces circonstances ne suffisaient pas à justifier la suppression de toute opportunité pour la requérante de renouer des liens avec ses enfants. Eu égard à ces considérations et nonobstant la marge d’appréciation de l’État en la matière, la CEDH conclut à l’unanimité que les autorités italiennes, en envisageant que la seule rupture définitive et irréversible du lien familial, alors que d’autres solutions visant à sauvegarder à la fois l’intérêt des enfants et le lien familial étaient praticables en l’espèce, n’ont pas déployé des efforts adéquats et suffisants pour faire respecter le droit de la requérante à vivre avec ses enfants, méconnaissant ainsi son droit au respect de la vie familiale, garanti par l’article 8 de la Convention. |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-158120 |