Document public
Titre : | Décision MSP-MLD-2015-182 du 1er octobre 2015 relative à un refus de regroupement familial opposé à un bénéficiaire de l’AAH |
Accompagne : | |
Auteurs : | Défenseur des droits, Auteur ; Expertise, Auteur |
Type de document : | Décisions |
Année de publication : | 01/10/2015 |
Numéro de décision ou d'affaire : | MSP-MLD-2015-182 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Allocation aux adultes handicapés (AAH) [Mots-clés] Regroupement familial [Mots-clés] Origine [Mots-clés] Handicap [Mots-clés] Discrimination [Documents internes] Observations devant une juridiction [Documents internes] Rapport annuel 2015 [Documents internes] Observations devant une juridiction avec décision rendue [Documents internes] Position suivie d’effet [Documents internes] Visa de la CIDE [Géographie] Algérie |
Résumé : |
Le Défenseur des droits a été saisi d’une réclamation relative à un refus de regroupement familial opposé au réclamant, ressortissant algérien bénéficiaire de l’allocation aux adultes handicapés (« AAH »), en raison de l’insuffisance de ses ressources.
Cette décision porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale du réclamant et à l’intérêt supérieur de l’enfant, contraire à l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. En outre, le refus de regroupement familial fondé sur la condition de ressources stables et suffisantes fixée par l’article 4 de l’Accord franco-algérien du 27 décembre 1968 revêt un caractère discriminatoire à raison du handicap. Pour ces motifs, le Défenseur des droits a décidé de porter des observations devant le tribunal administratif. |
Date de réponse du réclamant : | 18/12/2015 |
Suivi de la décision : |
Par un jugement du 18 décembre 2015, le tribunal a annulé la décision attaquée. Elle considère que l’absence de prise en compte, pour l’exercice du droit au regroupement familial, de la situation dans laquelle se trouve une personne atteinte de handicap, qui ne peut justifier d’autres ressources que celles liées à son handicap et qui n’est pas en mesure de justifier de ressources suffisantes, constitue une discrimination à raison du handicap contraire aux dispositions combinées des articles 14 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Le tribunal a ajouté que les stipulations de l’article 4 de l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968, applicables en l’espèce, doivent être interprétées comme n’ayant pu avoir pour objet ou pour effet de soumettre les titulaires de l’allocation pour adultes handicapés à la condition de ressources stables et suffisantes, lorsqu’ils ne sont pas susceptibles de dégager d’autres ressources. Relevant que le réclamant était atteint d’un taux d’incapacité entre 50 et 79 % et était dans l’impossibilité d’exercer une activité professionnelle en raison de son handicap, le juge a estimé que dans ces conditions, le préfet n’aurait pas dû lui opposer la nécessité de percevoir des ressources au moins égales au SMIC. Le tribunal a annulé la décision du préfet, lui a enjoint de délivrer au réclamant une autorisation de regroupement familial au bénéfice de son épouse et de son enfant dans un délai de trente jours à compter de la notification du jugement et a prononcé une astreinte de 50 euros par jour si le jugement n’était pas exécuté dans le délai imparti. Depuis dix ans, la HALDE puis le Défenseur des droits n’ont eu de cesse de faire valoir, à travers leurs recommandations et observations, que la condition de ressources stables et suffisantes imposée par l’article 4 de l’Accord franco-algérien, dès lors qu’elle est opposée à des personnes bénéficiaires de l’allocation adultes handicapés – dont le montant mensuel maximal est inférieur au SMIC –, exclut de facto ces personnes du droit au regroupement familial et crée ainsi une discrimination fondée sur le handicap, prohibée par les articles 14 et 8 combinés de la Convention européenne. Le présent jugement constitue dès lors une avancée jurisprudentielle pour la lutte contre les discriminations dans l’exercice du droit au regroupement familial. Il s’agit de la première décision de justice reconnaissant le caractère discriminatoire du refus de regroupement familial opposé à un ressortissant algérien, reconnu handicapé avec un taux d’incapacité entre 50 et 79%. Alors que le tribunal aurait pu annuler la décision en constatant une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale, eu égard à la situation personnelle du réclamant et à son état de santé critique, et écarter les autres griefs (ce que font habituellement les tribunaux), il a décidé d’examiner exclusivement le grief tiré du caractère discriminatoire du refus et en a conclu que le réclamant avait subi un traitement discriminatoire contraire aux articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme. |
Documents numériques (1)
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