
Document public
Titre : | Décision sur le bien-fondé relative à l'objection de conscience des prestataires de soins de santé et aux avortements en Suède : Fédération des Associations Familiales Catholiques en Europe (FAFCE) c. Suède |
Auteurs : | Comité européen des droits sociaux (CEDS), Conseil de l'Europe, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 17/03/2015 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 99/2013 |
Format : | 18 p. |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Santé - soins [Mots-clés] Charte sociale européenne [Mots-clés] Professionnel de la santé [Mots-clés] Interruption volontaire de grossesse (IVG) [Mots-clés] Accès aux soins [Mots-clés] Politique de santé [Mots-clés] Maternité [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Opinions philosophiques [Géographie] Suède |
Résumé : |
L’organisation réclamante estime que la Suède ne respecte pas ses obligations au titre de l'article 11 (droit à la protection de la santé) et de l'article E (non-discrimination) de la Charte sociale européenne, en négligeant d'adopter un cadre juridique et politique clair et complet régissant la pratique de l'objection de conscience par les prestataires de soins de santé en Suède, en permettant que les objecteurs de conscience soient traités de façon discriminatoire, et en manquant d'adopter des politiques et des lignes directrices claires et détaillées ainsi que pour prévenir les accidents graves ou les anomalies lorsque l'avortement est recommandée.
La Comité européen des droits sociaux conclut à l’unanimité à l’absence de violation de l’article 11 de la Charte concernant tous les griefs. Le Comité considère que l’article 11 n’impose pas aux Etats l’obligation positive d’établir un droit des personnels de santé à l’objection de conscience. Il souligne que cet article concerne principalement la garantie de l’accès à des soins de santé adéquats, ce qui implique pour les situations de maternité que les femmes enceintes en constituent les bénéficiaires principaux. En conséquence, cet article ne confère pas en soi un droit à l’objection de conscience du personnel du système de santé d’un Etat parti et dès lors, il ne s’applique pas en l’espèce. L’organisation réclamante soutenait par ailleurs que les personnels de santé qui souhaiteraient invoquer l’objection à l’avortement pour des motifs liés à la conscience, et n’y seraient pas autorisés, seraient dès lors victimes, au sein du système, de discrimination en raison de leur conviction. Or, dans la mesure où l’article 11 ne s’applique pas, la question de la discrimination au regard de l’article E est inopérante. Ensuite, la FAFCE avait estimé qu’il y a violation de l’article 11 de la Charte en raison de l’avortement de fœtus viables, l’avortement sélectif fondé sur le sexe et l’avortement à finalité eugénique. Le Comité estime que la réclamante cherche en l’espèce, par ces allégations, à élargir le champ d’application personnel de la Charte en y incluant l’enfant à naître. Or, cette question du début de la vie humaine, est particulièrement sensible dans de nombreux Etats parties à la Charte et implique des valeurs et de traditions très diverses selon les pays. Le Comité rappelle qu’il ne lui appartient pas d’aborder des questions d’ordre médical ou éthique mais d’interpréter les dispositions de la Charte du point de vue juridique. Les Etats parties jouissent d’une grande marge d’appréciation pour déterminer à quel moment commence la vie et il revient dès lors, à chaque Etat partie de décider, dans le respect de cette marge d’appréciation, dans quelle mesure le fœtus est bénéficiaire du droit à la santé. En l’espèce, le Comité estime que la Suède n’a pas excédé sa marge d’appréciation dans la mesure où la législation détermine un juste équilibre entre les droits de la femme et le droit à la santé du fœtus. Enfin, la FAFCE dénonçait le taux d’avortements pratiqués en Suède, qui serait l’un des plus élevés d’Europe. Le Comité estime qu’il ne peut être écarté qu’un nombre d’avortements particulièrement élevé puisse être directement attribué à la carence des autorités compétentes pour assurer l’accès aux moyens contraceptifs et/ou à considérer d’autres mesures pour prévenir les grossesses non désirées, ce qui pourrait poser problème au regard de l’obligation imposée par l’article 11§2 de développer un sens de responsabilité individuelle en matière de santé. Or, la FAFCE n’apporte pas la preuve que le nombre d’avortements pratiqués en Suède était manifestement élevé et que ces avortements résultaient de l’accès insuffisant aux moyens contraceptifs et à l’éducation insuffisante à la santé en matière de sexualité et de procréation. |
Note de contenu : | Adoptée le 17 mars 2015, la décision sur le bien-fondé a été rendue publique le 17 juin 2015. |
En ligne : | http://hudoc.esc.coe.int/eng?i=cc-99-2013-dmerits-fr |