Document public
Titre : | Jugement relatif à la reconnaissance au Québec de la double filiation paternelle à l’égard d’un enfant né de la gestation pour autrui aux Etats-Unis |
Auteurs : | Cour supérieure du Québec (Canada), Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 22/05/2015 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 500-04-062114-138 |
Format : | 28 p. |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] Québec [Géographie] Canada [Géographie] Etats-Unis [Mots-clés] État civil [Mots-clés] Gestation pour autrui (GPA) [Mots-clés] Paternité [Mots-clés] Filiation [Mots-clés] Famille homoparentale |
Résumé : |
Les requérants, un citoyen canadien et un ressortissant américain résident permanent au Canada, mariés en 2005, ont eu recours aux États-Unis à une mère porteuse conformément aux lois de la Californie. L’un des requérants est le père biologique de l’enfant né en 2013. L’acte de naissance américain ainsi que le jugement américain désignent les deux requérants comme les parents de l’enfant.
Ils ont demandé en vain la transcription de la filiation de l’enfant sur les registres de l’état civil du Québec. Le procureur et le directeur de l’état civil ont estimé que le jugement américain ne satisfait pas les conditions relatives à la reconnaissance des jugements étrangers. Par ailleurs, ils allèguent que la reconnaissance du jugement américain aurait pour conséquence d’avaliser un mode de filiation non reconnue par le code civil québécois qui prévoit que la convention portant sur la gestation pour autrui est nulle de nullité absolue. La Cour supérieure du Québec indique que s’il est clair qu’un tribunal ne pourrait donner effet à une telle convention, il peut intervenir afin de statuer sur la filiation des enfants nés à la suite de ces conventions conclues à l’étranger. Il examine si le résultat de la décision étrangère (la reconnaissance de filiation de deux hommes à l’égard de leur enfant) est manifestement incompatible avec l’ordre public, tel qu’il est entendu dans les relations internationales. Il estime que non seulement ce résultat n’est pas contraire à l’ordre public international, mais il ne l’est pas non plus en vertu de l’ordre public interne du Québec, le code civil québécois prévoit spécifiquement la possibilité pour un enfant d’avoir deux parents du même sexe. Ensuite, la Cour estime qu’aucune fraude à la loi ne peut être reprochée aux requérants qui étaient de bonne foi. Elle se réfère à une décision de justice rendue dans une affaire concernant la reconnaissance de filiation (adoptive) d’un parent d’intention à l’égard d’un enfant né de la gestation pour autrui. Dans cette décision, tout en soulignant qu’il n’existait pas un « droit à l’enfant », le juge a estimé qu’invoquer la notion d’ordre public venue du droit des obligations dans le contexte de cette affaire lui prête une portée qu’elle n’a pas, elle n’a pas ce caractère souverain et péremptoire. Il avait ajouté que cette notion ne peut servir à contrecarrer la volonté des parents adoptifs qui, avec transparence et dans le respect des lois sur l’adoption, ont voulu avoir recours à la procréation médicalement assisté pour que soit procrée un enfant et qu’il lui soit donné une famille. La Cour estime qu’en l’espèce, les requérants ont agi en toute transparence et dans le respect des lois du pays dont l’un des requérant est ressortissant. La Cour considère que la filiation du père biologique devrait être reconnue d’emblée. Elle estime que la nullité absolue au Québec des conventions portant sur la gestation pour autrui ne signifie pas qu’ipso facto, tous ses effets, même indirects, ne devraient pas être reconnu, étant souligné que l’enfant est un tiers à la convention. Elle ajoute que ne pas reconnaître les deux filiations aurait pour conséquence plusieurs difficultés (en l’espèce, le père « non biologique » s’est refuser un congé parental en absence de la transcription de l’acte américain). La Cour énonce qu’il n’est pas difficile de s’imaginer d’autres « préjudices » similaires qui pourraient être causés dans le futur. Elle estime que priver l’enfant de cette filiation constitue en soi un « préjudice inquantifiable ». La Cour fait donc droit à la demande des requérants et les déclare les parents de l’enfant et ordonne au directeur de l’état civil québécois d’insérer au registre le certificat de naissance américain. |
Documents numériques (1)
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