Document public
Titre : | Arrêt relatif au caractère discriminatoire du licenciement en raison de l'état de grossesse et du sexe et au harcèlement moral |
Titre précédent : | |
est cité par : | |
Auteurs : | Cour d'appel de Paris, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 03/06/2015 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 11/02886 |
Format : | 9 p. |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Sexe [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Harcèlement moral [Mots-clés] Emploi privé [Mots-clés] Carrière [Mots-clés] Congé parental [Mots-clés] Grossesse [Mots-clés] Défenseur des droits [Mots-clés] Congé de maternité |
Résumé : |
Une directrice "développement client", employée depuis 1999 au sein d’une grande société a été licencié en juin 2010. En 2008, elle a été absente pendant sept mois en raison de son congé maternité pour sa quatrième grossesse, des congés payés d’office et de la dispense de travail. A son retour, elle n’a pas retrouvé son poste (occupé par un salarié en CDI) et aucun autre poste équivalent ne lui a été proposé par la société. Ce n’est que sept mois après la fin de son congé maternité et au moment où elle a saisi le juge prud’homal pour demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail que l’employeur lui a proposé un poste alors que de nombreux autres postes pourvus par des collègues masculins auraient pu lui être proposés bien avant.
Soutenant avoir été victime de discrimination en raison de son sexe et son état de grossesse, l’intéressée a saisi le Défenseur des droits ainsi que le juge prud’homal. Le Conseil de prud’hommes l’a débouté de ses demandes et a estimé que le licenciement était justifié. La Cour d’appel suit les observations du Défenseur et infirme le jugement. Tout d’abord, la Cour indique que le Défenseur des droits, une autorité constitutionnelle indépendante, a la possibilité de présenter des observations devant les juridictions. Elle rejette l’argument de l’employeur qui demandait à ce que les observations du Défenseur soient écartées comme n’ayant pas respecté le principe du contradictoire, sans avoir repris cette demande dans le dispositif de ses conclusions. La Cour énonce qu’elle confirmera le point de vue soutenu par le Défenseur, selon lequel n’étant pas partie au procès, il n’est pas tenu aux règles de la procédure civile, notamment en ce qui concerne le caractère contradictoire et la transmission des pièces. Ensuite, la Cour estime que la manière de procéder de l’employeur, une entreprise de grande taille, notamment la proposition d’un poste équivalent intervenue seulement après la saisine du juge prud’homal et plusieurs mois après la fin du congé maternité, constitue une faute de la société justifiant la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le bien-fondé du licenciement, et qui produit des effets d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. La société est condamnée à verser à la salariée une somme de 140.000 euros à ce titre. La Cour ajoute que le contrat de travail ayant été rompu par la résiliation, il n’a pas lieu de rechercher si le licenciement état dépourvu de cause réelle et sérieuse ou nul. Par ailleurs, la société ne prouve pas que sa décision soit justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La Cour retient l’impossibilité à laquelle la salariée a été confrontée pendant de longs mois, à l’issue de son congé maternité, de se voir proposer un poste de responsabilité équivalent à celui qu’elle occupait avant son congé maternité, alors que pendant la même période, l’intéressée cite un ensemble de postes de responsabilité de niveau comparable, qui ne lui ont pas été proposé mais ont été confiés à des collègues masculins. La Cour d’appel conclut que conformément aux observations du Défenseur des droits, la salariée a été victime de discrimination, en raison à tout le moins de son sexe et de son état de grossesse. La société doit verser à la salariée une somme de 30.000 euros de dommages et intérêts pour discrimination qui lui a causé un préjudice moral et professionnel. Enfin, la Cour estime que l’employeur ne justifie pas les agissements qui lui sont reprochés (suppression de l’internet, de ligne téléphonique, de l’annuaire de l’entreprise, absence de convocation aux réunions, blocage de la carte essence, impossibilité d’accéder aux locaux sans badge). Sans qu’il soit établi de manière certaine que la détérioration de la santé de l’intéressée soit liée au harcèlement subi, la Cour juge qu’à travers de cet ensemble de faits répétitifs, la salariée a effectivement été victime de harcèlement moral puisque l’agissement de l’employeur (positionnement sur des missions temporaires, non-réintégration dans des délais raisonnables sur un poste équivalent) a eu pour effet de compromettre son avenir professionnel. La société doit verser à la salariée une somme de 30 000 euros au titre de harcèlement moral. |
Visa du préjudice lié à la discrimination ? : | Oui |
Dommages-intérêts alloués en raison de la discrimination (en euros) : | 60000 |
Somme allouée hors discrimination (en euros) : | 140000 |
Est accompagné de : |
Documents numériques (1)
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