
Document public
Titre : | Arrêt relatif à la différence de traitement fondée sur l'âge visant la réduction d'activité des moniteurs de ski âgés au profit des jeunes |
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est cité par : | |
Auteurs : | Cour de cassation, Cass. Soc., Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 17/03/2015 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 13-27142 |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Âge [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Emploi privé |
Résumé : |
En 2012, le Syndicat national des moniteurs de ski français avait adopté une nouvelle disposition de ses statuts intitulée « pacte intergénérationnel » destiné à être intégré dans les conventions type signées entre les écoles de ski français (ESF) locales et les moniteurs de ski, organisant la réduction d’activité de ces derniers à partir de 62 ans.
Dix-huit moniteurs de ski adhérents du syndicat ont saisi la justice pour obtenir la nullité de cette disposition en faisant valoir que le système ainsi arrêté privait progressivement de la répartition des cours dans les ESF les moniteurs âgés de plus de 61 ans et constituait une mesure discriminatoire en raison de l’âge prohibée par le droit de l’Union européenne et la loi du 27 mai 2008 portant divers dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de lutte contre les discriminations. Les requérants ont obtenu satisfaction. Toutefois, la Cour d’appel a infirmé le jugement sur le fondement de la loi du 27 mai 2008 en estimant que la disposition litigieuse n’était pas discriminatoire. La Cour avait retenu que l'intégration des jeunes diplômés au sein des ESF était un objectif légitime et que l'insuffisance de ces jeunes était défavorable à la qualité de l'enseignement qui se doit être diversifié pour répondre à la demande d'une clientèle (nouvelles techniques de glisse, enseignement à des petits enfants). Elle s'était par ailleurs appuyée sur l'avis du Défenseur des droits qui avait estimé que le projet de pacte cherchait à faciliter l'intégration des moniteurs plus jeunes. La Cour avait relevé en outre que cette pratique de réduction progressive d'activité mise en place depuis plusieurs années a permis d'intégrer de jeunes moniteurs diplômés. Elle a estimé que le maintien des moniteurs âgés de plus de 62 ans aurait pour conséquence la non titularisation, pendant plusieurs années, des jeunes moniteurs. Enfin, elle avait jugé que l'exigence de proportionnalité était respectée dans la mesure où les désavantages causées par la diminution d'activité imposée aux intéressés âgés de 62 à 67 ans étaient atténués par la validation a minima de deux trimestres d'assurance vieillesse de chaque saison et par le fait qu'ils conservaient toute liberté d'exercice avec la clientèle personnelle qu'ils avaient pu se constituer grâce à l'ESF. La Cour de cassation casse et annule l’arrêt pour violation de la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail ainsi que de l’article L.1133-2 du code du travail issu de la loi du 27 mai 2008. Elle rappelle que selon la directive européenne les États membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs de politique de l’emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens à réaliser cet objectif son appropriés et nécessaires. La Cour de cassation reproche aux juges d’appel de ne pas avoir constaté que la différence de traitement fondée sur l’âge était objectivement et raisonnablement justifiée par un objectif d’intérêt général, tenant notamment à la politique de l’emploi, au marché du travail ou à la formation professionnelle. La Cour de cassation estime qu'en l’espèce, la prise en compte d’un intérêt purement individuel et propre à la situation des écoles de ski désireuses de répondre à la demande de la clientèle, ne pouvant être considérée comme légitime au regard de la directive et l’article L.1133-2. De même, la Cour d’appel n’a pas constaté que les moyens pour réaliser cet objectif étaient appropriés et nécessaires. En effet, le pacte litigieux se contente de prévoir une garantie minimale pour les « moniteurs nouvellement intégrés » sans précision d’âge, de sorte qu’il n’est pas établi que la redistribution d’activité des moniteurs âgés de plus de 61 ans bénéficiera exclusivement aux jeunes moniteurs. L’affaire est renvoyée pour être jugée devant une autre Cour d’appel. |
En ligne : | http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000030383142 |