
Document public
Titre : | Ordonnance de référé relative à l'annulation d'un arrêté municipal interdisant la tenue d'un spectacle |
Voir aussi : | |
Auteurs : | Conseil d'Etat, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 06/02/2015 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 387726 |
Format : | 7 p. |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Judaïsme [Mots-clés] Discrimination [Mots-clés] Manifestation [Mots-clés] Liberté d'expression [Mots-clés] Collectivité territoriale [Mots-clés] Procédure de référé [Mots-clés] Maintien de l'ordre public |
Résumé : |
Un maire avait interdit la tenue d’un spectacle qui devait avoir lieu quelques jours plus tard dans une salle de spectacle de la commune. Il avait estimé que seule l’interdiction du spectacle était de nature à assurer le maintien de l’ordre public.
Il avait avancé plusieurs motifs pour justifier cette interdiction. D’une part, il considérait que ce spectacle comporte des propos de caractère antisémite semblables à ceux pour lesquels son auteur a fait l’objet de plusieurs condamnations pénales, ainsi que des propos et des gestes portant atteinte à la dignité humaine, et d’autre part, que ces propos et ces gestes sont de nature à mettre en cause la cohésion nationale dans un contexte caractérisé par les attentats perpétrés à Paris début janvier 2015, mais aussi de nature à susciter une réaction émotionnelle importante de la population de la commune, dont l’une des victimes de ces attentats était originaire. Par ailleurs, selon le maire, des actes de vandalisme dirigés contre la communauté juive et musulmane et certains courriers qui lui ont été adressés peuvent laisser craindre des incidents violents. Enfin, le maire justifiait l’interdiction du spectacle également par le fait que les effectifs de police, tous mobilisés dans le cadre du plan Vigipirate n’étaient pas disponibles pour prévenir la survenance de troubles. Le juge des référés saisi par l’humoriste avait annulé l’arrêté du maire et lui avait enjoint de laisser se dérouler ce spectacle. Le maire conteste cette décision devant le Conseil d’Etat. Le Conseil d’Etat énonce que l’exercice de la liberté d’expression est une condition de la démocratie et l’une des garanties du respect des autres droits et libertés. Il appartient aux autorités chargées de la police administrative de prendre les mesures nécessaires à l’exercice de la liberté de réunion. Il ajoute que les atteintes portées, pour des exigences d’ordre public, à l’exercice de ces libertés fondamentales, doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées. Or, en l’espèce, le Conseil relève qu’il ne résulte pas des pièces du dossier ni des échanges tenues au cours de l’audience public que le spectacle litigieux, programmé dès le mois de juin 2014 dans la salle communale, qui a déjà été donné à plusieurs reprises dans d’autres villes en décembre et janvier derniers, y ait suscité en raison de son contenu, des troubles à l’ordre public, ni ait donné lieu, pour des mêmes raison, à des plaintes ou des comportements pénales. Il ajoute qu’il ne résulte pas davantage de l’instruction que le spectacle litigieux comporterait les propos retenus par le maire dans les motifs de son arrêté. Le Conseil d’Etat approuve le juge des référés de première instance qui a estimé que ni le contexte national, ni les éléments de contexte local relevés par le maire dans son arrêté, notamment pas les messages de soutien ou de protestation, principalement reçus à la suite de son arrêté et dont un seul évoque la possibilité d’une manifestation, ne sont, en l’espèce, de nature, par eux-mêmes, à créer de tels risques. De même, ne l’établissent pas d’avantage les diverses condamnations pénales de l’auteur du spectacle ou sa mise en cause devant le juge pénal pour d’autres faits. Enfin, le Conseil d’Etat considère que si la tenue d’un tel spectacle appelle certaines mesures de sécurité, la commune se borne à affirmer, sans apporter de précisions de nature à étayer son argumentation, que ces mesures ne pourraient être prises du fait de l’existence du plan « vigipirate » et du niveau d’alerte retenue et justifieraient ainsi son interdiction. |
En ligne : | http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?idTexte=CETATEXT000030219773 |