Document public
Titre : | Arrêt relatif au refus de restituer au père biologique un enfant né sous X et placé en vue de l'adoption plénière |
Auteurs : | Cour d'appel de Rennes, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 25/11/2014 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 14/04384 |
Format : | 16 p. |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Droit de visite [Mots-clés] Adoption [Mots-clés] Placement [Mots-clés] Adoption plénière [Mots-clés] Accouchement sous X [Mots-clés] Paternité [Mots-clés] Protection de l'enfance |
Résumé : |
Un enfant né sous X. fin avril 2013 a été admis le jour même en qualité de pupille de l’État à titre provisoire par l’arrêté du président du conseil général. L’arrêté précisait que s’il n’est pas repris dans un délai de 2 mois, l’enfant deviendrait pupille de l’État à titre définitif.
Dans le même temps, début mai 2013, un homme, détenu à l'époque dans un établissement pénitentiaire, a déclaré devant l’officier d’état civil de reconnaître l’enfant dont sa compagne était enceinte. Ce n'est que par la suite que le père biologique a eu connaissance du caractère anonyme de l'accouchement et de la date de naissance de l'enfant. L'apposition de la reconnaissance de paternité en marge de l'acte de naissance de l'enfant a eu lieu en octobre 2013. Le 3 juillet, le conseil de famille des pupilles de l’État, qui n’était pas au courant de la reconnaissance paternelle, a donné son consentement à l’adoption de l’enfant, confié dès le 12 juillet à un couple en vue de son adoption plénière. Or, dans le même temps, le père biologique a demandé au Conseil général de surseoir à statuer sur toute décision de placement en vue de l’adoption. Mi-octobre 2013, le père biologique a demandé au Conseil général la restitution de l’enfant. En se fondant sur les dispositions de l’article 352 du code civil, selon lesquelles, le placement en vue d’adoption met obstacle à toute restitution de l’enfant à sa famille d’origine, le président du Conseil général a refusé d’accueillir favorablement la demande du père biologique. Toutefois, en avril 2014, soit huit mois après le placement de l’enfant en vue de son adoption plénière, le tribunal de grande instance a annulé l’arrêté du 30 avril 2013 admettant l’enfant en qualité de pupille de l’État et a ordonné la restitution de l’enfant au père biologique. Le juge a constaté que la reconnaissance de paternité ne faisait l’objet d’aucune contestation et que la demande du père biologique apparaissait de l’intérêt de l’enfant et conforme à ses droits en ce qu’elle tendait à permettre à l’enfant de connaître son père et de vivre avec lui au sein de sa famille paternelle. Selon les juges, l’accueil de l’enfant dans le cadre d’un projet d’adoption n’était pas une circonstance qui apparaissait suffisante pour que la demande de restitution soit rejetée en l’état du devenir incertain de la procédure d’adoption envisagée compte tenu de l’établissement de la filiation paternelle et du défaut de consentement du père. Le Conseil général a fait appel de ce jugement. La Cour d’appel infirme le jugement en ce qu’il a ordonné la restitution de l’enfant au père biologique. Elle indique que si le père biologique a effectué une reconnaissance « dite avant » naissance, l’enfant était, en réalité, né antérieurement à celle-ci. La Cour considère que la reconnaissance d’un enfant naturel étant déclarative de filiation, ses effets remontent au jour de sa naissance et que le consentement à l’adoption est donné par le parent à l’égard duquel la filiation est établie. La Cour observe cependant, que le père biologique a fait connaître qu’il avait identifié l’enfant postérieurement à la date à laquelle le conseil de famille, qui n’était pas informé de la reconnaissance, a donné son consentement à l’adoption. Par ailleurs, la Cour note que le père biologique n’a pas d’emblée sollicité la restitution de l’enfant. La Cour conforte donc la position du Conseil général selon laquelle le placement en vue de l’adoption met obstacle à toute restitution de l’enfant à sa famille de l’origine. Ensuite, en s’appuyant sur les avis de plusieurs spécialistes, la Cour juge qu’il n’est pas de l’intérêt de l’enfant (au sens de l’article L.224-8, alinéa 2 du code de l’action sociale et des familles) d’être confié à la garde du père biologique. En effet, les spécialistes se sont accordés sur le fait que la séparation de l’enfant d’avec ses parents adoptifs serait gravement traumatisante pour lui. La Cour note en outre que le père biologique ne justifie d’avoir aucun projet particulier pour l’enfant et que les parents adoptifs qui respectent l’histoire de l’enfant, ne comptent occulter ni son histoire ni l’existence de ses parents biologiques. Elle conclut qu’il n’y a pas lieu d’annuler l’arrêté d’admission de l’enfant en qualité de pupille de l’État. Enfin, la Cour relève que l’enfant est âgé seulement de 19 mois et juge, en s’appuyant sur les avis des spécialistes, qu’il est prématuré d’accueillir favorablement la demande subsidiaire du père tendant à la mise en place d’un droit de visite à son profit. Les spécialistes ont précisé notamment que ce droit de visite devrait être pensé de manière à ne pas compromettre l’équilibre psycho-affectif de l’enfant et ne saurait être mis en place sans un ensemble de dispositions et de précaution absolument indispensable. Par ailleurs, ils ont indiqué que la question de l’âge à laquelle ce droit de visite pourra être exercé devra être soigneusement réfléchie et le fonctionnement psychologique du père biologique devrait être pris en compte ainsi que ses capacités à entrer sans violence dans sa relation avec l’enfant et à s’inscrire dans un axe narratif de la filiation biologique. |
Visa du préjudice lié à la discrimination ? : | Non |
Documents numériques (1)
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