
Document public
Titre : | Arrêt relatif à une fouille à nu réalisée dans une cage d’escalier et qui a porté une atteinte disproportionnée au respect de la vie privée du détenu : Jaeger c. Estonie |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 31/07/2014 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 1574/13 |
Format : | 15 p. |
Langues: | Anglais |
Mots-clés : |
[Mots-clés] Fouille à nu [Mots-clés] Établissement pénitentiaire [Mots-clés] Respect de la vie privée et familiale [Mots-clés] Droit des détenus [Mots-clés] Administration pénitentiaire [Géographie] Estonie |
Résumé : |
L’affaire concernait une fouille à corps pratiquée sur un détenu dans une cage d’escalier devant les autres détenus alors qu’il retournait à sa cellule après la promenade.
Les gardiens de prison qui soupçonnaient le requérant d’introduire clandestinement des cigarettes dans les cellules lui ont demandé d’enlever son pantalon et ses sous-vêtements. L’intéressé avait contesté en vain ce traitement qu’il estimait dégradant car la scène a eu lieu dans une cage d’escalier devant les autres détenus. Les juges nationaux l’ont débouté de ses demandes et la Cour suprême estonienne avait jugé qu’il n’y avait pas eu atteinte à son intimité et à sa dignité. Invoquant les articles 3 (interdiction des traitements inhumains ou dégradants) et 8 (droit au respect de la vie privée), le requérant allègue en particulier que la fouille qu’il avait subie avait été humiliante et qu’il était impossible de mener de telles fouilles en respectant l’intimité du détenu dans la cage d’escalier de la prison, celle-ci donnant sur deux portes vitrées. En l’espèce, la CEDH conclu à la non-violation de l’article 3 contrairement à ce qu’elle a pu juger auparavant dans d’autres affaires concernant les fouilles à nu où celles-ci constituaient selon la Cour un traitement dégradant. Elle estime que bien que le requérant était, comme tous les détenus, dans une position vulnérable entre les mains des autorités, il n’était pas dans une situation particulièrement impuissante. Par ailleurs, la fouille litigieuse n’a eu lieu qu’une seule fois contrairement aux fouilles corporelles régulières dénoncées dans d’autres affaires portées devant la CEDH. En outre, la Cour tient également compte des éléments transmis par les autorités estoniennes concernant les sanctions disciplinaires dont le requérant a fait l’objet, y compris pour la possession des objets non-autorisés. Bien que la plupart des infractions disciplinaires aient eu lieu après la fouille litigieuse, cette information caractérise néanmoins selon la Cour l’attitude du requérant à l’égard des règles de la prison et son comportement en général. Ces éléments sont suffisants selon la Cour pour conclure que la détresse subie par le requérant n’avait pas atteint le minimum de gravité prohibée par l’article 3. Cependant, elle considère qu’il y a eu violation de l’article 8 de la Convention. La Cour considère que la question de savoir si le requérant a été effectivement vu les autres détenus pendant la fouille n’est pas d’une importance décisive. Même si la Cour n’exclut pas que la fouille corporelle qui a lieu dans un couloir ou dans une cage d’escalier d’un bâtiment de la prison immédiatement après l’entrée du détenu puisse être considérée comme acceptable à condition que la procédure soit effectuée dans le respect de la vie privée du détenu. En l’espèce, tel n’était pas le cas selon la Cour puisque la fouille à nu a été réalisée dans une cage d’escalier accessible par deux portes vitrées. Les autorités ont donc porté une atteinte disproportionnée au respect de la vie privée du requérant et ce, indépendamment de la question de savoir si d’autres détenus l’ont effectivement vu pendant la fouille. |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-145787 |