Document public
Titre : | Arrêt relatif à la condamnation de la France en raison de la mort d'un gardé à vue, tué par un gendarme lors de sa tentative d'évasion : Guerdner et autres c. France |
est cité par : | |
Auteurs : | Cour européenne des droits de l'homme, Auteur |
Type de document : | Jurisprudences |
Année de publication : | 17/04/2014 |
Numéro de décision ou d'affaire : | 68780/10 |
Format : | 37 p. |
Langues: | Français |
Mots-clés : |
[Géographie] France [Mots-clés] Gendarmerie [Mots-clés] Violence [Mots-clés] Décès [Mots-clés] Garde à vue [Mots-clés] Arme à feu |
Résumé : |
Les requérants sont douze ressortissants français appartenant à la communauté des gens du voyage. L’affaire concerne le décès d’un membre de la famille des requérants, qui avait été placé en garde à vue et tué par un gendarme alors qu’il tentait de s’évader.
En mai 2008, le suspect était interpellé et placé en garde à vue dans les locaux de la gendarmerie à la suite d’une enquête pour des faits de vol à main armée en bande organisée avec enlèvement et séquestration. Au terme d’une audition, il réussit à ouvrir une fenêtre pour sauter à l’extérieur du bâtiment où il était retenu. Un gendarme tira à plusieurs reprises dans sa direction. Le suspect décéda peu après des suites de ses blessures. En septembre 2010, la cour d’assises acquitta le gendarme au motif qu’il avait accompli un acte prescrit ou autorisé par les dispositions législatives ou réglementaires. Invoquant l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’homme (droit à la vie), les requérants alléguaient que leur proche avait été tué de manière injustifiable et qu’il n’y avait pas eu d’enquête indépendante ni de procès impartial sur les circonstances du décès. Tout en relevant que des ajustements nationaux pourraient encore améliorer la lisibilité des dispositifs du droit interne relatives à l’usage des armes à feu, la CEDH juge que le cadre juridique français est suffisant pour offrir un niveau de protection du droit à la vie « par la loi » qui est requis dans les sociétés démocratiques contemporaines en Europe. Elle estime que la mort du proche des requérants n’a pas résulté de l’absence de règles claires ou du fait que se poursuite ne bénéficiait pas de la structure appropriée qu’auraient dû fournir le droit et la pratique interne pertinent, y compris quant aux questions relatives au port de l’uniforme et à la sommation effectuée avant de tirer. En effet, si ce dernier point fait l’objet d’une controverse entre les parties, c’est un aspect de l’affaire qui a été examiné au cours de l’instruction et au cours du procès, et qui ne révèle pas que le gendarme a agi comme il l’a fait parce qu’il n’aurait pas reçu la formation ou les instructions adéquates en la matière démontrant une carence du niveau de protection offert par la législation française pertinente. Il n’y a donc pas eu de violation de l’article 2 de la Convention sur ce point. La Cour rappelle sa jurisprudence antérieure en matière de recours à la force meurtrière selon laquelle ce recours doit être rendu absolument nécessaire pour atteindre l'un des objectifs mentionnés à l'article 2 de la Convention et en particulier être strictement proportionné à ses buts. En l’espèce, la CEDH n’est pas convaincue que le recours à la force contre l’intéressé procédait d’une conviction fondée sur des raisons légitimes de penser que celui-ci constituait une réelle menace au moment des faits, autorisant le recours à la force potentiellement meurtrière. Selon la Cour, d'autres possibilités d'action s'offraient au gendarme pour tenter l'arrestation du fugitif, au lieu d'ouvrir le feu : le temps nécessaire pour descendre les escaliers a été estimé à treize secondes et de nombreux gendarmes étaient présents au moment des faits, ce qui aurait permis une course poursuite à la recherche du fugitif. En conséquence, dans ces circonstances, la CEDH conclut à un usage de la force manifestement excessif et condamne la France de ce chef. Enfin, concernant l’article 2 sous son volet matériel, la Cour estime qu’il n’y a pas eu violation de cet article du fait que l’enquête a été confiée à la Gendarmerie nationale. De même, il n’y a pas eu violation de cette disposition dans la conduite du procès par les autorités judiciaires. |
En ligne : | http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-142426 |
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